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mardi 17 janvier 2012

XV. Tabous Alimentaires en Paleo-Islam



I. Introduction :

Culturellement, les tabous alimentaires en islam sont fort éloignés des versets coraniques et plus étendus et rigoureusement codifiés. Ces usages ayant été par ailleurs bien entérinés par les écoles de jurisprudence tant sunnite que chiite. Nous allons dans ce billet nous pencher sur le sujet, et voir qu'ici encore, il y a des erreurs fondatrices, et un éloignement de l'islam primitif. Nous verrons la position des disciples du Prophète antérieure aux écoles de jurisprudence. Des lecteurs musulmans pourront se dire que nous avons critiqué des sujets des plus profonds au point d'en arriver aux tabous alimentaires. Pourtant, nous ne faisons qu'étudier les versets de façon historico-critique, n'ayant nulle ambition de changer les usages dans le monde musulman. Ce ne sont évidemment pas là des fatwas, mais il s'agit bien d'une étude critique à but scientifique. Il demeure par ailleurs la possibilité d'apporter des rectifications ou objections dans la partie commentaires si des lecteurs ont des points à soulever.



Hyène et vautours autours d'un animal mort.



II. Chronologie des Versets Coraniques :

(6:118-145) : "Mangez donc de ce sur quoi on a prononcé le nom d’Allah si vous êtes croyants en Ses versets (le Coran). Qu’avez-vous à ne pas manger de ce sur quoi le nom d’Allah a été prononcé ? Alors qu’Il vous a détaillé ce qu’Il vous a interdit, à moins que vous ne soyez contraints d’y recourir. Beaucoup de gens égarent, sans savoir, par leurs passions. C’est ton Seigneur qui connaît le mieux les transgresseurs. Evitez le péché apparent ou caché, (car) ceux qui acquièrent le péché seront rétribués selon ce qu’ils auront commis. Et ne mangez pas de ce sur quoi le nom d’Allah n’a pas été prononcé, car ceux-ci sont corrompus*. Les diables inspirent à leurs alliés de disputer avec vous. Si vous leur obéissez, vous deviendrez certes des associateurs. (...) Certes, les injustes ne réussiront jamais. Et ils assignent à Allah une part de ce qu’Il a Lui-même créé, en fait de récoltes et de bestiaux, et ils disent : 'Ceci est à Allah - selon leur prétention ! - et ceci à nos divinités.' Mais ce qui est pour leurs divinités ne parvient pas à Allah, tandis que ce qui est pour Allah parvient à leurs divinités. Comme leur jugement est mauvais ! Et c’est ainsi que leurs divinités ont enjolivé à beaucoup d’associateurs le meurtre de leurs enfants, afin de les ruiner et de travestir à leurs yeux leur religion. (...) Et ils dirent : 'Voilà des bestiaux et des champs frappés d’interdiction : n’en mangeront que ceux que nous voudrons.' - selon leur prétention [1] ! - Et voilà des bêtes dont le dos est tabou [2], et des bêtes sur lesquelles ils ne mentionnent pas le nom d’Allah [3]. Une barrière* contre Lui ! Il les rétribuera pour ce qu’ils inventaient comme mensonges. Et ils dirent : 'Ce qui est dans le ventre de ces bêtes est réservé aux mâles d’entre nous, et interdit à nos femmes.'[1]  Et si c’est un mort-né, ils y participent tous [1]. Bientôt Il les rétribuera pour leur prescription, car Il est Sage et Omniscient. Ils sont certes perdants, ceux qui ont, par sottise et ignorance tué leurs enfants, et ceux qui ont interdit ce qu’Allah leur a attribué de nourriture, inventant des mensonges contre Allah. Ils se sont égarés et ne sont point guidés. C’est Lui qui a créé les jardins, treillagés et non treillagés; ainsi que les palmiers et la culture aux récoltes diverses; [de même que] l’olive et la grenade, d’espèces semblables et différentes. Mangez de leurs fruits, quand ils en produisent; et acquittez-en les droits le jour de la récolte. Et ne gaspillez point car Il n’aime pas les gaspilleurs. Et (Il a créé) parmi les bestiaux, certains pour le transport, et d’autres pour diverses utilités [2]; mangez de ce qu’Allah vous a attribué, et ne suivez pas les pas du Diable, car il est pour vous un ennemi déclaré. (Il en a créé) huit, en couples: deux pour les ovins, deux pour les caprins... dis : 'Est-ce les deux mâles qu’Il a interdits ou les deux femelles, ou ce qui est dans les matrices des deux femelles ? Informez-moi de toute connaissance, si vous êtes véridiques' [1] ; deux pour les camélidés, deux pour les bovins... Dis : 'Est-ce les deux mâles qu’Il a interdits ou les deux femelles, ou ce qui est dans les matrices des deux femelles ? Ou bien étiez-vous témoins quand Allah vous l’enjoignit ?' [1] Qui est donc plus injuste que celui qui invente un mensonge contre Allah pour égarer les gens sans se baser sur aucun savoir ? Allah ne guide pas les gens injustes. Dis : 'Dans ce qui m’a été révélé, je ne trouve d’interdit, à aucun mangeur d’en manger, que la bête (trouvée) morte, ou le sang qu’on a fait couler, ou la chair de porc - car c’est une souillure - ou ce qui, par corruption, a été consacré à autre qu’Allah'. Quiconque est contraint, sans toutefois abuser ou transgresser, ton Seigneur est certes Pardonneur et Miséricordieux."

Ce qui est rendu par "ceux-ci sont corrompus" est écrit  فسق  en arabe. Si ce terme signifie l'idée de pervertir, de dévoyer, il signale initialement la mise en écart, la corruption : il est question de les destiner à autre que Dieu. De même, ce qui est rendu par "des inventions" s'écrit افْتِرَاء en arabe. Or, ce terme désigne l'idée d'interrompre, de retenir. Le but étant selon leurs croyances de consacrer ces bêtes exclusivement à leurs idoles, en les empêchant de monter à Dieu. Ainsi, le verset condamnant le refus de manger de ce sur quoi le nom de Dieu a été invoqué concerne les bêtes qu'ils égorgeaint pouvant atteindre leurs idoles. Tandis que les bêtes interrompues expressément pour les consacrer aux idoles sont ainsi prohibées comme corrompues. Sans que l'invocation du nom de Dieu ne soit catégoriquement imposée. Par conséquent mentionner le nom de Dieu est recommandé, mais il n'y a pas d'interdiction de manger des bêtes si le nom de Dieu n'est pas invoqué, à condition que ce ne soit volontaire, dans le but précis de les destiner aux idoles, ce qui est alors interdit.

(16/115-117) : "Il vous a, en effet, interdit (la chair) de la bête morte, le sang, la chair de porc, et la bête sacrifié à un autre qu'Allah. Mais quiconque en mange sous contrainte, et n’est ni rebelle ni transgresseur, alors Allah est Pardonneur et Miséricordieux. Et ne dites pas, conformément aux mensonges proférés par vos langues : 'Ceci est licite, et cela est illicite', pour forger le mensonge contre Allah. Certes, ceux qui forgent le mensonge contre Allah ne réussiront pas. Ce sera pour eux une piètre jouissance, mais un douloureux châtiment les attend."

(2/172-273) : "O les croyants! Mangez des (nourritures) licites que Nous vous avons attribuées. Et remerciez Allah, si c’est Lui que vous adorez. Certes, Il vous interdit la chair d’une bête morte, le sang, la viande de porc et ce qui a été consacré à un autre qu’Allah. Il n’y a pas de péché sur celui qui est contraint sans toutefois abuser ni transgresser, car Allah est Pardonneur et Miséricordieux."

(5/1-3 , 96) : "Ô les croyants! Remplissez fidèlement vos engagements. Vous est permise la bête du cheptel, sauf ce qui sera énoncé [comme étant interdit]. Ne vous permettez point la chasse alors que vous êtes en état d’ihrâm. Allah en vérité, décide ce qu’Il veut. Ô les croyants ! Ne profanez ni les rites du pèlerinage (dans les endroits sacrés) d’Allah, ni le mois sacré, ni les animaux de sacrifice, ni les guirlandes, ni ceux qui se dirigent vers la Maison sacrée cherchant de leur Seigneur grâce et agrément. Une fois désacralisés, vous êtes libres de chasser. Et ne laissez pas la haine pour un peuple qui vous a obstrué la route vers la Mosquée sacrée vous inciter à transgresser. Entraidez-vous dans l’accomplissement des bonnes œuvres et de la piété et ne vous entraidez pas dans le péché et la transgression. Et craignez Allah, car Allah est, certes, dur en punition. Vous sont interdits la bête [trouvée] morte, le sang, la chair de porc, ce sur quoi on a invoqué un autre nom que celui d’Allah, la bête étouffée [1]la bête assommée [2] ou morte d’une chute [3] ou morte d’un coup de corne [4], et celle qu’une bête féroce a dévorée [5] - sauf celle que vous purifiez-. (Vous sont interdits aussi la bête) qu’on a immolée sur les pierres dressées, ainsi que de procéder au partage par tirage au sort au moyen de flèches. Car cela est perversité. Aujourd’hui, les mécréants désespèrent (de vous détourner) de votre religion : ne les craignez donc pas et craignez-Moi. Aujourd’hui, J’ai parachevé pour vous votre religion, et accompli sur vous Mon bienfait. Et J’agrée l’Islam comme religion pour vous. Si quelqu’un est contraint par la faim, sans inclination vers le péché... alors, Allah est Pardonneur et Miséricordieux. (...)  La chasse en mer vous est permise, et aussi d’en manger, pour votre jouissance et celle des voyageurs. Et vous est illicite la chasse à terre tant que vous êtes en état d’Ihram. Et craignez Allah vers qui vous serez rassemblés."

Le verset (5:3) est chronologiquement le dernier en ce domaine, et il est exclu qu'il puisse avoir été abrogé comme le verset précise que la religion est parachevée. On y trouve aussi les précisions au sujet  de l'interdiction de la bête trouvée morte.


(6/121; 145) : "Et ne mangez pas de ce sur quoi le nom d’Allah n’a pas été prononcé, car ce serait (assurément) une corruption. Les diables inspirent à leurs alliés de disputer avec vous. Si vous leur obéissez, vous deviendrez certes des associateurs. (...) Dis : 'Dans ce qui m’a été révélé, je ne trouve d’interdit, à aucun mangeur d’en manger, que la bête (trouvée) morte, ou le sang qu’on a fait couler, ou la chair de porc - car c’est une souillure - ou ce qui, par corruption, a été sacrifié à autre qu’Allah'. Quiconque est contraint, sans toutefois abuser ou transgresser, ton Seigneur est certes Pardonneur et Miséricordieux."

La question de manger de la bête sur laquelle le nom de Dieu n'est pas invoqué a été sujet à débats. D'après la lecture contextuelle, il ne s'agit pas de l'obligation de mentionner ou non le nom de Dieu lors de l'égorgement, mais d'une catégorie de bêtes consacrées aux idoles, dont la chair ne devait pas monter à Dieu mais aller aux idoles...


III. Ce Sur Quoi le Nom de Dieu n'est Pas Invoqué :


وَقَالُواْ هَذِهِ أَنْعَامٌ وَحَرْثٌ حِجْرٌ لاَّ يَطْعَمُهَا إِلاَّ مَن نّشَاء بِزَعْمِهِمْ وَأَنْعَامٌ حُرِّمَتْ ظُهُورُهَا وَأَنْعَامٌ لاَّ يَذْكُرُونَ اسْمَ اللّهِ عَلَيْهَا افْتِرَاء عَلَيْهِ سَيَجْزِيهِم بِمَا كَانُواْ يَفْتَرُونَ

Ce verset montre que la catégorie des bêtes sur lesquelles le nom de Dieu n'est point invoqué constitue une classe de bêtes consacrées aux idoles dont la chair ne devait pas monter à Dieu et ainsi être consacrée aux idoles. Par conséquent, ce tabou n'est pas un tabou autre que les quatre tabous prémentionnés (bête trouvée morte, viande de porc, sang coulé, viande dédiée aux idoles), mais une sous catégorie des viandes destinées aux idoles ou égorgée au nom d'autre que Dieu, devant les pierres dressées des idoles Mecquoises.


III.a. Monture  Maudite et Monture Consacrée :

Il est rapporté que le Prophète était en voyage et qu’une femme ansarite l’accompagnait sur une chamelle. Elle fut agacée par cette dernière et maudit sa monture. Lorsque le Prophète l’entendit, il dit : 'Prenez ce qu’elle transporte et laissez-la partir car elle est maudite !' "


Dans ce hadith, nous voyons que la chamelle est interdite à monter du fait qu'elle a été maudite par une personne, de même, les bêtes consacrées aux idoles, égorgées ou pas encore égorgées deviennent impurs et tabous :

  1. Ces bêtes sont interdites à certains,
  2. Ces bêtes sont interdites à la monture,
  3. Ces bêtes sont destinées à autre que Dieu. 

* Les bêtes sur lesquelles le nom de Dieu n'est pas invoqué étaient des bêtes consacrées aux idoles dont on souhaitait empêcher la montée à Dieu.


(6/136) : "Et ils assignent à Allah une part de ce qu’Il a Lui-même créé, en fait de récoltes et de bestiaux, et ils disent : 'Ceci est à Allah - selon leur prétention ! - et ceci à nos divinités.' Mais ce qui est pour leurs divinités ne parvient pas à Allah, tandis que ce qui est pour Allah parvient à leurs divinités. Comme leur jugement est mauvais !"


III.b. Le Sang et la Chair ne  Montent Pas à Dieu :

(22/36-37) : "Nous vous avons désigné les chameaux (et les vaches) bien portants pour certains rites établis par Allah. Il y a en eux pour vous un bien. Prononcez donc sur eux le nom d’Allah, quand ils ont eu la patte attachée, [prêts à être immolés]. Puis, lorsqu’ils gisent sur le flanc, mangez-en, et nourrissez-en le besogneux discret et le mendiant. Ainsi Nous vous les avons assujettis afin que vous soyez reconnaissants. Ni leurs chairs ni leurs sangs n’atteindront Allah, mais ce qui L’atteint de votre part c’est la piété. Ainsi vous les a-t-Il assujettis afin que vous proclamiez la grandeur d’Allah, pour vous avoir mis sur le droit chemin. Et annonce la bonne nouvelle aux bienfaisants." 

Ce passage montre l'esprit de la mention du nom divin dans l'esprit des Arabes de l'époque. Le but étant de dédier ou envoyer le sang et la chair de la bête aux dieux. Ainsi, en évitant expressément de mentionner le nom d'Allah devait consacrer leurs chair et sang aux seules idoles. Ce qui est donc un usage décrit comme sans fondement dans le Coran. La chair ou le sang ne montant nullement à Dieu... Par ailleurs, le verset qui arrive plus loin dans la même sourate réitère les véritables tabous alimentaires : (6/121; 145) : "Et ne mangez pas de ce sur quoi le nom d’Allah n’a pas été prononcé, car cela consiste (assurément) en une corruption. Les diables inspirent à leurs alliés de disputer avec vous. Si vous leur obéissez, vous deviendrez certes des associateurs. (...) Dis : 'Dans ce qui m’a été révélé, je ne trouve d’interdit, à aucun mangeur d’en manger, que la bête (trouvée) morte, ou le sang qu’on a fait couler, ou la chair de porc - car c’est une souillure - ou ce qui, par corruption, a été sacrifié à autre qu’Allah'. Quiconque est contraint, sans toutefois abuser ou transgresser, ton Seigneur est certes Pardonneur et Miséricordieux."


III.c. Est-Il Obligatoire de Citer le Nom de Dieu 


D'après  Aïcha : "Des gens nous apportent de la viande et nous ne savons pas s’ils ont mentionné le Nom d’Allah sur celle-ci [en l’égorgeant].» Le Prophète dit alors : 'Mentionnez, vous, le nom d’Allah et mangez.'" (al-Bukhāri : 5507)

Par conséquent, il est permis de manger d'une viande si on n'a pas invoqué le nom de Dieu dessus au moment du sacrifice, à condition de le mentionner soi-même en en mangeant.


III.d. Analyse du terme ذكو :

Le terme traduit par engorgement vient de la racine ðkw (ذكو) fondée sur l'idée de purifier. La bête trouvée morte, tout comme le sang et la dépouille d'un porc est susceptible s'être porteur de microbes pouvant causer des problème sanitaires. Il semblerait qu'originellement, le terme rendu par l'idée d'égorgement venait de l'idée que la bête ne soit pas en décomposition au moment de la saignée. Autrement, cette racine ne contient pas de connotation liée à l'idée de sang, ou de couper. La mayta (bête morte) n'est pas permise, sauf si saignée pour la consommation avant la mort (cérébrale). 


IV.  De la Viande d'Âne :

Ce sujet est souvent soulevé quand il est question des tabous alimentaires en islam, penchons-nous donc sur la question sur base des récits et du contexte invoqués pour interdire la viande d'âne. 

Abdallah ibn abi Awfa d'après ach-Chaybani : "J’ai interrogé Abdallah ibn abi Awfa sur la consommation de la chair des ânes domestiques. Alors, il dit : 'Nous souffrîmes de la faim au jour de Khaybar, pendant que nous étions en compagnie du Prophète. Or, ayant capturé des ânes domestiques, nous les égorgeames. Alors que nos marmites bouillaient, le héraut de l'Envoyé vint crier 'Renversez les marmites ! Et ne mangez pas de la chair des ânes. On se demanda : 'L'interdiction était-elle absolue ? Nous avons discuté entre nous et certains ont dit : Le Prophète prononça une interdiction absolue et d'autres ont vu qu'il les avait interdits jusqu'à ce que les fidèles rendent le quint au Trésor.'" (Sahîh de Muslim : 3585)

ibn Abbas a dit : "Je ne sais si l'Envoyé d'Allah a interdit la consommation de la chair des ânes domestiques, parce qu’ils servaient de monture aux fidèles et qu'il n’aimait pas voir disparaitre ces montures, ou si il a interdit la consommation de la chair des ânes domestiques au jour de Khaybar." (Sahih de Muslim : 359)

Le fait que les ânes aient été capturés et égorgés avant le partage du butin suffisait à les rendre illicites, sans qu'il faille y chercher d'autre raison. Autrement, on tombe en travers des versets coraniques.


V. Animaux Canins et Ongulés :

 A. La Question de Cette Prohibition :

ibn Abbas a dit : "Le Prophète a rejeté tout fauve avec une canine et tout rapace (ongulé)."

abu Tha'labah a dit :  "Le Prophète a rejeté  tout fauve avec une canine."

abu Hurayra a rapporté d'après le Prophète : - "La viande de tout fauve avec une canine est interdite".

ibn abi Ammar rapporte : On interrogea Jaber au sujet de la viande de hyène. Il permit d'en manger. Je lui demandai si c'était le Prophète qui l'a permises, il répondit : "Oui."

(abu Dawud, At’ima 31; Nassai, Sayd: 27; ibn Majah : Sayd: 15)

ibn Abdubarr rapporte néanmois que des Sahabas à l'instar d'ibn Abbas, Aïcha et selon une source ibn Umar, Cha'bi, Said ibn Jubayr, Jaber etc permettaient de manger des bêtes carnivores, et qu'ils appuyaient cela par le verset ; (5:96) : "Dis : 'Dans ce qui m’a été révélé, je ne trouve d’interdit, à aucun mangeur d’en manger, que la bête (trouvée) morte, ou le sang qu’on a fait couler, ou la chair de porc - car c’est une souillure - ou ce qui, par corruption, a été sacrifié à autre qu’Allah'. Quiconque est contraint, sans toutefois abuser ou transgresser, ton Seigneur est certes Pardonneur et Miséricordieux."


B. An'am 146 et La Source du Malentendu :

(6:145-147) : "Dis : 'Dans ce qui m’a été révélé, je ne trouve d’interdit, à aucun mangeur d’en manger, que la bête (trouvée) morte, ou le sang qu’on a fait couler, ou la chair de porc - car c’est une souillure - ou ce qui, par corruption, a été sacrifié à autre qu’Allah'. Quiconque est contraint, sans toutefois abuser ou transgresser, ton Seigneur est certes Pardonneur et Miséricordieux. Aux Juifs, Nous avons interdit toute bête à ongle. Des bovins et des ovins, Nous leurs avons interdit les graisses, sauf ce que portent leur dos, leurs entrailles, ou ce qui est mêlé à l’os. Ainsi les avons-Nous punis pour leur rébellion. Et Nous sommes bien véridiques. Puis, s’ils te traitent de menteur, alors dis : 'Votre Seigneur est Détenteur d’une immense miséricorde cependant que Sa rigueur ne saura être détournée des gens criminels'."

Il faut souligner qu'ibn Abbas n'avait que 13 ans au décès du Prophète. Tandis qu'abu Hurayra ne l'a fréquenté que trois ans. Quant à abu Tha'labah il n'a embrassé l'islam que l'année de Hudaybiyya. ibn Abbas est réputé pour ses commentaires sur le Coran, et il semble qu'il se fonde sur ce passage qui rejoint dans le fond l'idée de cette prohibition. Il a pu le communiquer à abu Tha'labah et abu Hurayra qui est aussi des membres de Suffa a pu l'entendre au même moment ou le prendre d'abu Tha'labah. Car malgré la transmission dans le sens, les paroles d'abu Tal'abah et d'ibn Abbas sont très similaires mot pour mot. Or, les plus anciens Sahabas permettaient de manger des animaux prédateurs. Par ailleurs, on rapporte une version contraire d'après ibn Abbas autorisant cela. Il semble qu'ibn Abbas ait confondu ce passage coranique au sujet des tabous israélites avec les tabous en islam. Aïcha a corrigé à plusieurs occasions de telles erreurs au sujet des femmes passant devant la personne qui prie, le fait que les défunts entendent les visiteurs, ou les choses sensées porter malheur. Il semble qu'ibn Abbas ait communiqué cela à abu Hurayra et abu Thal'abah, et se soit rétracté en ayant discuté avec les anciens. L'influence des savants de la Syrie a privilégié cette version lors de la canonisation des écoles jurisprudentielles.


C. La Viande de Lézard :

Khaled ibn Walid rapporte qu'un jour on présenté un lézard rôti au Prophète, qui n'en mengeait pas, Khaled demanda alors : "est-ce harām". Le Prophète lui répondit : "Non, mais ce n'était pas dans la terre de mon peuple et il se trouve que je déteste." (Sahih Muslim, Sayd: 7; Darimi, Sayd: 8 )



Lézard mangeant une souris. La viande de lézard est explicitement autorisée par le Prophète. Et cela montre que les bêtes carnivores sont permises.



VI. S'Abstenir Sauf Au Peril de Sa Vie :

Par ailleurs, la tolérance des versets est restreinte à la condition de risquer de mourir avant de manger de ces viandes tabous. Ce qui est une autre influence du Kharéjisme ayant influencé l'islam primitif. Comme cela a été le cas pour de nombreux autres sujets.


VII. Conclusions :

a. Le Coran exprime très explicitement que les seules choses interdites par Dieu sont : 1. La bête trouvée morte, 2. la viande de porc, 3. le sang coulé, 4. la bête consacrée à autre que Dieu : (6:145). Et cela est réappuyé au verset (5:3) à la fin de la carrière du Prophète. Témoignant qu'il n'y a pas eu de changement. De même, le Coran condamne l'interdiction fantaisiste des aliments en ces termes ; (16:116-117) :  "Et ne dites pas, conformément aux mensonges proférés par vos langues : 'Ceci est licite, et cela est illicite', pour forger le mensonge contre Allah."

b. L'interdiction supposée de la viande d'âne résulte d'un malentendu sur la prohibition de manger de la viande d'ânes chassés à Khaybar avant le partage du butin, qui a suscité une croyance d'une interdiction totale. Ce qui aurait été en contradiction avec le Coran.

c. De même, la divergence d'ibn Abbas (âgé de seulement 13 ans au décès de Muhammad), abu Tha'labah (également converti assez tardivement à l'islam) et d'abu Hurayra (transmettant suivant des anciens et n'ayant fréquenté le Prophète que trois années) des Sahabas plus anciens sur le tabou des bêtes carnassières, et les versions contradictoires au nom d'ibn Abbas permettant aussi cela d'après d'autres sources montrent que les versets sont suffisants pour trancher à ce sujet.

d. Enfin, le verset (6:118) interdisant de manger des bêtes sur lesquelles le nom de Dieu n'a pas été invoqué concerne selon la même sourate les bêtes dédiés aux idoles. Les bêtes égorgées au nom de Dieu considérées par les polythéistes parvenant aux idoles (6:136) sont néanmoins permises (6:118).

(6:136) : "Et ils assignent à Allah une part de ce qu’Il a Lui-même créé, en fait de récoltes et de bestiaux, et ils disent: 'Ceci est à Allah - selon leur prétention! - et ceci à nos divinités.' Mais ce qui est pour leurs divinités ne parvient pas à Allah, tandis que ce qui est pour Allah parvient à leurs divinités. Comme leur jugement est mauvais !"

Tandis que ce qui est consacré aux idoles en ne mentionnant pas le nom de dieu est la viande destinée aux idoles impure condamnée parmi les quatre tabous alimentaires coranique n'ayant point changé.

e. La contrainte et la faim autorisant de manger de ces alilments tabous étant interprétée comme le péril de la mort ne se fonde par ailleurs pas sur un verset ou un hadith, le sens de ces versets étant clairement la miséricorde divine. Conformément à de nombreux versets allant en ce sens, comme celui-ci ; (2:185) : "Allah veut pour vous la facilité, et non la difficulté", ou celui-ci ; (5:102-105) : "Ô les croyants ! Ne posez pas de questions sur des choses qui si elles vous étaient divulguées, vous mécontenteraient. Et si vous posez des questions à leur sujet, pendant que le Coran est révélé, elles vous seront divulguées. Allah vous a pardonné cela. Et Allah est Pardonneur et Indulgent. Un peuple avant vous avait posé des questions (pareilles) puis, devinrent de leur fait mécréants.".  (10:59) :  "Dis : "Avez-vous considéré ce que Dieu a fait descendre pour vous de subsistance puis vous avez fait de cela du harām et du halāl", dis : 'Est-ce Dieu qui vous (en) a donné l'autorisation, ou bien inventez-vous (des choses) au sujet de Dieu ?'",   (16:116) : "Et ne dites pas, à cause du fait que vos langues profèrent le mensonge : "Ceci est halāl, et ceci est harām", forgeant le mensonge au sujet de Dieu. Ceux qui forgent au sujet de Dieu le mensonge ne réussiront point"...












lundi 16 janvier 2012

XVI. Dessin, Sculpture et Musique, Chronologie de Leur Prohibition



A. Introduction :

Analysons les sources islamiques fondatrices touchant le dessin, la sculpture et la musique. Il est bien ancré dans les esprits via tous les ouvrages de jurisprudence, les manuels religieux, ouvrages d'exégèse et autres que les représentations figurées sont tenues pour strictement prohibées en islam. Nous pouvons lire que le Messager aurait dit que les Anges n'entrent pas dans les maisons où il y a des représentations figurées, que leurs réalisateurs seront maudits et que tant qu'ils ne leur donneront pas de vie ils seront éternellement condamnés à l'enfer. Quoi que plusieurs récits nous sont parvenus avec de très nombreuses variantes, nous voyons que ce tabou se fonde en réalité sur quatre récits fondateurs historiques précis. Quels sont ces événements ayant conduit les savants à la prohibition formelle des représentation figurées ?



Le Prophète condamnait la vénération des Saints dans les Eglises sans proprement comdamner tout dessin.



B. Evénements fondateurs :

1) Un jour, Aïcha employa un rideau décoré de dessins de chevaux à l'entrée de sa chambre dans la Grande Mosquée de Yathrib. Le Prophète voyant cela lui dit : "Nous n'avons pas été commandé de décorer les pierres et le ciment" en guise de mécontentement. Aïcha rapporte avoir sur ce découpé ce rideau et fabriqué avec des coussins auxquels le Prophète s'appuyait chez-elle sans faire d'autre reproche. (Muslim.)

حَدَّثَنَا إِسْحَاقُ بْنُ إِبْرَاهِيمَ، أَخْبَرَنَا جَرِيرٌ، عَنْ سُهَيْلِ بْنِ أَبِي صَالِحٍ، عَنْ سَعِيدِ، بْنِ يَسَارٍ أَبِي الْحُبَابِ مَوْلَى بَنِي النَّجَّارِ عَنْ زَيْدِ بْنِ خَالِدٍ الْجُهَنِيِّ، عَنْ أَبِي طَلْحَةَ الأَنْصَارِيِّ، قَالَ سَمِعْتُ رَسُولَ اللَّهِ صلى الله عليه وسلم يَقُولُ ‏"‏لاَ تَدْخُلُ الْمَلاَئِكَةُ بَيْتًا فِيهِ كَلْبٌ وَلاَ تَمَاثِيلُ‏"‏‏.‏ قَالَ فَأَتَيْتُ عَائِشَةَ فَقُلْتُ إِنَّ هَذَا يُخْبِرُنِي أَنَّ النَّبِيَّ صلى الله عليه وسلم قَالَ ‏"‏لاَ تَدْخُلُ الْمَلاَئِكَةُ بَيْتًا فِيهِ كَلْبٌ وَلاَ تَمَاثِيلُ‏"‏‏.‏ فَهَلْ سَمِعْتِ رَسُولَ اللَّهِ صلى الله عليه وسلم ذَكَرَ ذَلِكَ فَقَالَتْ لاَ وَلَكِنْ سَأُحَدِّثُكُمْ مَا رَأَيْتُهُ فَعَلَ رَأَيْتُهُ خَرَجَ فِي غَزَاتِهِ فَأَخَذْتُ نَمَطًا فَسَتَرْتُهُ عَلَى الْبَابِ فَلَمَّا قَدِمَ فَرَأَى النَّمَطَ عَرَفْتُ الْكَرَاهِيَةَ فِي وَجْهِهِ فَجَذَبَهُ حَتَّى هَتَكَهُ أَوْ قَطَعَهُ وَقَالَ ‏"‏إِنَّ اللَّهَ لَمْ يَأْمُرْنَا أَنْ نَكْسُوَ الْحِجَارَةَ وَالطِّينَ"‏‏.‏ قَالَتْ فَقَطَعْنَا مِنْهُ وِسَادَتَيْنِ وَحَشَوْتُهُمَا لِيفًا فَلَمْ يَعِبْ ذَلِكَ عَلَىَّ

abu Talha al-Ensari a rapporté : “Le Messager a dit : 'Les Anges n'entrent pas dans les maisons où se trouvent un chien ou une image. Le transmetteur Zayd ibn Khalid commenta : “Sur ce je me suis rendu chez Aïcha demander : abu Talha m'a rapporté que le Messager a dit : 'Les Anges n'entrent pas dans les maisons où se trouvent un chien ou une icone, as-tu entendu cela du Prophète ? Aïcha répondit : 'Non je n'ai pas entendu cela venant du Prophète, mais je vais te rapporter un autre incident, j'ai un jour accroché à l'entrée depuis la Mosquée vers ma chambre un rideau avec des franges comportant des dessins. Et je constatai le mécontentement du Prophète à sa vue qui arracha le rideau et dit : − Allah ne nous a pas commandé d'habiller les pierres et le ciment.'. Aïcha ajouta : 'J'ai découpé le drap et fabriqué deux coussins, que j'ai bourrés de tiges de dattier. Le Messager je m'a jamais fait de reproche à ce sujet." (Muslim ; abu Dawud.)

Dans d'autres variantes de ce récit nous lisons : "A chaque prière ces images me rappellent le monde"; "Les Anges n'entrent pas là où figurent des dessins", "au jour du Jugement ceux qui dessinent cela seront invités à les animer de vie, ce dont ils seront incapables et demeureront dans le feu", ou sans explication de son mécontentement. Ces commentaires sont des ajouts postérieurs au récit originel : ne pas avoir été commandé de décorer les murs de la mosquée.


La porte de la chambre de Aïcha donnait directement sur la cour intérieure de la salle de prières de la Mosquée du Prophète.


2) Un jour un chiot entra dans la chambre d'Aïcha et Gabriel ne vint plus visiter Muhammad. Jusqu'à ce que Muhammad trouve le chiot et le sorte de la chambre et alors l'Ange arriva. Cet incident fut fusionné avec le récit précédant par abu Talha conduisant à la croyance que les anges n'entrent pas dans une demeure où figure une image. Pourtant, dans le récit sus-mentionné, Aïcha précise ne pas avoir été témoin d'un tel événement. Autrement dit le fait que Gabriel ne vienne pas n'est pas lié à un interdit sur les images. Ce récit a évolué au gré de sa transmission, au point que Muslim rapporte le récit du chiot selon ibn Abbas via sa tante Maymuna, or ce récit est chadh et improbale. Que le même incident de Gabriël interrompant ses visites survienne trois fois est absurde : une fois avec Aïcha sans reproche sur les images, une fois avec Aïcha lié à un chiot et les images, une fois avec Maymuna lié à un chiot et les images. En outre le récit d'Aïcha est formel : à l'intérieur de sa chambre les coussins comportant des dessins étaient utilisés par le Prophète.


3) Le jour de la prise de la Mecque, le Prophète vit des images dans la Ka'ba et s'abstint d'y pénétrer demandant de les effacer au préalable. 

Abdallah ibn Abbas rapporte : Le Prophète rentrait dans la maison, y voyant des dessins il s'abstint d'y entrer et commanda de les détruire. Il y vit des représentations d'Abraham et Ismail avec des baguettes de divination et dit : "Que Dieu les punisse. Vraiment, ils n'ont jamais pratiqué d'oracle." (al-Bukhāri, Anbiya, Hajj, Maghazi.)

حَدَّثَنَا إِبْرَاهِيمُ بْنُ مُوسَى، أَخْبَرَنَا هِشَامٌ، عَنْ مَعْمَرٍ، عَنْ أَيُّوبَ، عَنْ عِكْرِمَةَ، عَنِ ابْنِ عَبَّاسٍ ـ رضى الله عنهما أَنَّ النَّبِيَّ صلى الله عليه وسلم لَمَّا رَأَى الصُّوَرَ فِي الْبَيْتِ لَمْ يَدْخُلْ، حَتَّى أَمَرَ بِهَا فَمُحِيَتْ، وَرَأَى إِبْرَاهِيمَ وَإِسْمَاعِيلَ ـ عَلَيْهِمَا السَّلاَمُ ـ بِأَيْدِيهِمَا الأَزْلاَمُ فَقَالَ ‏ "‏قَاتَلَهُمُ اللَّهُ، وَاللَّهِ إِنِ اسْتَقْسَمَا بِالأَزْلاَمِ قَطُّ"‏‏


D'autres variantes de ce récit disent : “Au jour de la prise de la Mecque, le Prophète pénétrant dans la Ka'ba vit les images d'Abraham, Ismaël et de Marie et dit : −Faites attention ! Que fait ce peuple de Qoraïche ? Ils savent certes très bien que les Anges n'entrent pas là où figurent des images. Ils représentent Abraham avec des flèches d'oracles, or jamais il n'a fait usage de celles-ci..

La partie barrée est clairement un rajout postérieur un mudraj'ul matn. Comment donc Qoraïche aurait entendu une telle chose, qui plus est avant de réaliser ces fresques...

4) Ummu Habiba et Ummu Salama retournés d'Abyssinie contaient la beauté au Prophète des fresques d'une certaine basilique du nom de Maria. 

Aïcha rapporte : “Lorsque le Messager tomba malade, l'une des épouses lui parla d'une certaine église nommée Maria qu'elle a vue en Abyssinie. Ummu Salama et Ummu Habiba avaient émigré en Abyssinie. Elles racontèrent donc la beauté de cette église et ses fresques. Le Prophète redressa la tête et leur dit : −Ceux-ci, lorsqu'un saint mourait, les vénéraient en bâtissant dessus une église qu'ils décoraient de ces fresques. Ce sont au jour du Jugement les pires des gens tourmentés." ." (al-Bukhāri, Muslim.)

 

Cet événement est rapporté selon ibn Mas'ud ainsi : “J'ai entendu le Messager disant : 'Les pires des personnes les plus tourmentées en enfer seron les dessinateurs d'images.'.” (al-Bukhāri, Nasai.)

Le même récit est repris par ibn Umar sous cette forme : “Le Messager dit : En faisant ces images, ces dessinateurs seront tourmentés. On leur dira : 'Allez, animez ces images.” (al-Bukhāri, Muslim, Nasai.)

Cette remarque du Prophète au sujet des églises a été amplifiée avec les autres récits et les débats entre disciples du Prophète, et formé un tabou encore augmenté par le commandement à Ali de démolir les idoles. ibn Hajar aussi souligne ceci. Or, il est question de condamner la vénération des saints. L'idée du "châtiment le plus dûr aux dessinateurs" dérive de cet incident. Dans certaines variantes on lit "donnez-leur la vie". Cet ajout est un commentaire rajouté qui n'émane clairement pas du Prophète. Du premier incident découle l'idée de tabou de "décorer les maisons" et "accrocher des tapis aux murs". En sorte que finalement, certains en déduisirent que le Messager à maudit les dessinateurs, qui est une version interprétative de ces mêmes événements.



C. Des Versets Contraires à Ce Tabou :

(Cor. 3:49) : “Il sera le messager aux enfants d’Israël, [et leur dira] : 'En vérité, je viens à vous avec un signe de la part de votre seigneur. Pour vous, je forme de la glaise comme la figure d’un oiseau, puis je souffle dedans: et, par la permission d’Allah, cela devient un oiseau. Et je guéris l’aveugle-né et le lépreux, et je ressuscite les morts, par la permission d’Allah. Et je vous apprends ce que vous mangez et ce que vous amassez dans vos maisons. Voilà bien là un signe, pour vous, si vous êtes croyants!  ”

(Cor. 34:13) :  Ils exécutaient pour lui ce qu’il voulait : sanctuaires, statues, plateaux comme des bassins, et marmites bien ancrées. - 'Ô famille de David, œuvrez par gratitude', alors qu’il y a eu peu de mes serviteurs qui sont reconnaissants.”

Si les images étaient si sévèrement tabou, Salomon et Jésus n'auraient pas réalisé ou commendé de réaliser des statues. Ce qui conforte clairement notre analyse critique présente au sujet de l'établissement de cet interdit après le décès du Prophète.



Il est admis que le Temple de Salomon était décoré de statues (Cor. 34:13), ce qui exclut un châtiment aussi sévère à l'encontre de leur réalisateurs. De même que la frabrication par Jésus d'oiseaux de glaise (Cor. 3:49). 


"Si on vous transmet une chose comme venant de moi, référez-la au Livre d'Allah, si il y est conforme prenez, sinon ce n'est pas vraiment de moi." [1]

D. Le Statut de la Musique en Paléo-Islam

La question de la musique en islam a toujours suscité des débats, souvent influencés par des interprétations postérieures et des contextes socio-culturels. Pourtant, lorsqu'on revient aux sources du Paléo-Islam – c’est-à-dire aux pratiques et enseignements du Prophète Muhammad et de ses compagnons – on ne trouve aucune interdiction explicite de la musique en tant que telle.

Le Hadith souvent cité : une prophétie et non une interdiction

L'unique hadith sahih souvent utilisé pour prétendre une prohibition de la musique est celui qui mentionne les événements de la fin des temps :

"Certains de ma communauté considèreront comme licites la fornication, la soie (pour les hommes), le vin et les instruments de musique." Rapporté sans chaîne de transmission par al-Bukhârî, 5590. L'isnad présent chez d'autres présente Hicham Ibn Ammar qui a été discuté pour son manque de rigueur.

Ce récit d'après abu Malik Ach'ari existe sous une seconde version où celui-ci affirme que le Messager d'Allah a dit : "Des gens de ma nation boiront du vin en l'appelant d'un autre nom, on jouera pour eux d'instruments de musique et il y aura des chanteuses. Allah les fera engloutir par la terre et les transformera en singes et en porcs."

La lecture attentive montre que ce hadith décrit une scène où des hommes et des femmes se réunissent pour écouter de la musique tout en consommant des substances enivrantes. Il ne s'agit donc pas d'une interdiction catégorique de la musique, mais plutôt d’une prophétie sur un certain mode de vie décadent. Ibn Hazm (994-1064)[2], grand juriste andalou, a rejeté l’idée que ce hadith puisse interdire la musique en général, arguant qu’il s’agissait d’une description et non d’une prescription légale. D'autant plus qu'il s'agit d'un khabar ahad.

Les exemples du Prophète : une acceptation de la musique et de la danse

Plusieurs épisodes de la vie du Prophète démontrent qu'il ne considérait pas la musique et la danse comme illicites.

  1. Les Abyssins dansant dans la mosquée
    Un jour, des Abyssins sont venus à la Grande Mosquée de Médine pour présenter une danse folklorique avec des lances. Non seulement le Prophète n’a pas interdit cette manifestation, mais il a même ramené Aïcha pour qu’elle puisse les observer et apprécier le spectacle.

  2. Les jeunes femmes chantant et dansant
    Lors d’une fête, des jeunes femmes chantaient et dansaient à proximité du Prophète. Abu Bakr, en les voyant, les a réprimandées, mais le Prophète l’en a empêché en disant : "Laissez-les, car chaque communauté a son jour de fête, et c’est notre jour de fête." (Sahih al-Bukhari, 952)

  3. Les chants et poèmes pour motiver les caravanes
    Lors des déplacements du Prophète avec ses compagnons, il était courant que des poèmes et des chants rythment la marche des caravanes afin d’encourager les hommes et les chameaux à avancer. Ces chants n’étaient pas considérés comme un mal, mais au contraire comme un outil utile et motivant.

L'interdit porte sur le contexte, pas sur la musique elle-même

Ce que les textes islamiques dénoncent, ce ne sont pas les instruments ou le chant en soi, mais plutôt les contextes où la musique s’accompagne d’éléments répréhensibles (débauche, ivresse, propos immoraux, etc.). La musique en tant qu’art et moyen d'expression n’a jamais été condamnée par le Prophète.

Ainsi, en revenant au Paléo-Islam, on comprend que la musique était une pratique normale, acceptée et même encouragée dans certaines circonstances. L’interdit repose non sur l’acte lui-même, mais sur l’usage qui en est fait et l’environnement dans lequel il se manifeste.



E. Conclusions :

Le Prophète condamna la construction d'églises sur les dépouilles des saints en vue de les vénérer, il a empêché d'accrocher un rideau avec des dessins de chevaux dans l'enceinte de la Grande Mosquée en tolérant leur usage dans les chambres annexes, et fait effacer les icones de prophètes de l'intérieur de la Ka'ba. Or, son silence sur l'usage de ces images dans la chambre d'Aïcha prouve que ceux-ci n'étaient pas prohibés dans les maisons. Si les dessinateurs d'images étaient tourmentés en enfer, Jésus n'aurait pas formé d'oiseau de glaise, et si ceux-ci étaient commandés de donner vie à leurs figurations, Salomon n'aurait pas fait sculpter de statue. Par conséquent il devient évident que les variantes de ces hadiths incompatibles avec le Coran doivent être triés. De fait une fois triés nous identifions les récits initiaux et comprenons le processus de transformations [note]. Voici la conclusion à laquelle nous arrivons à l'analyse systématique de ces récits.








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[1] Haythamī, Majmāu’z-Zawā'aid, 170; Suyūtī, Miftah, 16.

[2] Ibn Hazm souligne plusieurs points techniques pour rejeter l’interdiction généralisée de la musique à partir de ce hadith : (1) khabar ahad : Il s’agit d’un hadith isolé (ahad), ce qui signifie qu’il n’a pas été transmis par un grand nombre de personnes et ne peut donc pas établir une règle absolue en matière légale. Dans la jurisprudence islamique, un hadith ahad ne suffit pas à établir une interdiction catégorique, surtout dans des domaines aussi vastes que la culture et les arts. (2) Hadith Mu'anan : Ce hadith est également mu‘anan, c’est-à-dire qu’il contient des transmissions où l’expression "‘an fulan ‘an fulan" ("untel rapporte d’untel") est utilisée, ce qui peut poser un problème de chaîne de transmission si le lien entre les rapporteurs n’est pas direct ou vérifié avec certitude. (3) Hadith Contextuel : Ibn Hazm rappelle que le hadith ne parle pas de la musique en soi, mais d’une situation où elle est associée à la débauche et à l’ivresse. Il en conclut que ce n’est pas la musique qui est blâmable, mais plutôt son usage dans un cadre de corruption morale. En résumé, Ibn Hazm considère que ce hadith ne peut pas servir de base à une interdiction universelle de la musique. Son analyse repose sur une rigueur méthodologique qui empêche d’en faire un argument absolu contre la musique, surtout lorsqu’on observe que le Prophète a toléré et même encouragé certaines formes musicales et artistiques dans des contextes appropriés.