A. Introduction :
Dans cet article, nous allons aborder la question de la dimension psychologique du fiqh. A quel point un savant est objectif lorsqu'il émet des avis, et comment expliquer l'éloignement des usages actuels de ceux du premier islam ? Nous allons nous pencher dans le présent article, sur l'une des causes principales de cette dérive : la dimension psychologique et neurocognitive.
B. Effets de la Psychologie :
B-1. La crainte de se tromper en pensant de façon neutre :
Il est de fait incontournable que les recherches portant sur une religion ayant un cumul de plus de mille deux cent ans de quêtes et de développements soient confrontées à des difficultés considérables. En effet, de nombreuses écoles et obédiences se seront instituées au gré du temps, et il ne sera pas aisé d'interroger les avis des anciens. Ainsi, un savant se contentera pour ainsi dire presque exclusivement de rapporter et citer les opinions et fatāwa des anciens et il s'installera un conflit d'autorité. Cependant, cette méthode, outre le fait d'être problématique, se révèle contraire à la méthode suivie par les anciens. Autrement, il ne devrait exister qu'une seule école et une seule voie, ce qui est incompatible avec la nature humaine, et invraisemblable du fait des limites linguistiques et de la dérive sémantique.
B-2. Cohérence et psychologie de groupe :
Un chercheur ou un savant se devra de s'imposer une méthode rigoureuse, et de suivre une école de jurisprudence, selon ce que ses maîtres lui auront transmis comme méthodologie. Très régulièrement, de par le souci de soutenir les avis de son école bien institués, il deviendra inévitable de glisser vers la torsion des informations pour obtenir ce qui y est recherché. Or, le souci de la cohérence de la démarche ne sera assurée non pas par la fidélité aux avis des anciens, mais suivant la puissance de l'argumentation objective.
B-3. Attachement charnel à un avis marginal :
Parfois, un savant optant pour un avis différent de celui de ses maîtres percevra ses conclusions comme une découverte et s'y attachera charnellement au point d'être dérangé par la remise en question de celui-ci. Ceci consiste probablement en le point le plus ardu de la jurisprudence islamique. Le malaise éprouvé envers les avis différents et les contre-arguments est la marque d'un défaut méthodologique. Parfois aussi, un tel attachement aveugle se relève chez des savants envers un savant ou une école existante.
B-4. Perspective de piété et conflit avec l'objectivité :
Le point le plus sensible à devoir surmonter est la recherche d'un comportement pieux. En effet, la richesse des approches et avis qui existait chez les premières générations de fidèles a cédé systématiquement face à la sélections mécanique pieuse des point de vues les plus sévères ; les avis les plus souples étant abandonnés ou rejetés comme étant la marque d'un manque de piété. De même, la crainte de tomber dans l'erreur a joué une fonction centrale interdisant toute remise en question des usages ancestraux. De cette façon, de sa forme naturelle et souple, l'islam primitif allait céder et dériver vers une religiosité de plus en plus sévère, entérinant systématiquement les avis les plus strictes et élaguant les plus souples. Les avis les plus sévères privilégiés par un esprit de piété allant au gré du temps un à un repousser les plus souples, en sorte d'abandonner les avis de savants autrefois très influents, et même ceux des Sahabas eux-mêmes. Ainsi, un retours aux origines ne devenant possible qu'en priorisant les sources fondatrices et la démonstration rigoureuse. En donnant la priorité de la démonstration et la vérifiabilité sur la notion d'une piété mal canalisée.
B-5. Méthode expéditive et suivisme aveugle :
La crainte de faire une erreur, et le respect envers les devanciers fait presque toujours surgir une méthode expéditive consistant au maintient des usages et à ne surtout pas les interroger. C'est très exactement à ce niveau que le retours vers l'islam originel achoppe.
B-6 Notion d'iʤmāʔˤ :
Il y a un principe fondateur des écoles de jurisprudence en islam, c'est la notion d'iʤmāʔˤ (consensus). Un certain hadith identifié à partir du IIIeS, et rapporté suivant des chaînes de transmissions problématiques est souvent invoqué pour fonder ce principe, qui raconte que le Messager aurait dit : "Ma communauté ne s'unira jamais sur l'égarement". Ce faux hadith est considéré comme une preuve inviolable des consensus des anciens. Il n'y a pas d'accord unanime sur ce qui est à tenir comme iʤmāʔˤ chez les savants : ibn Hanbal affirme que c'est l'avis majoritaire des savants sur un sujet à une certaine époque, certains savants soutiennent que c'est un consensus exclusif chez les sahabas, d'autres un consensus chez les seuls savants, sans contre-exemple, mais quand un savant a un avis divergent celui-ci est considéré contrevenir au consensus. Les hanafites considèrent que les savants peuvent changer un consensus antérieur s'ils sont unanimes, mais les autres écoles rejettent cette affirmation Gazzali affirme que c'est un consensus général parmi les savants comme parmi le peuple, il existe même un avis selon ibn Mas'ūd qui dit que le consensus consiste à accepter ce qui est vrai, même si l'on est seul contre tous. Concrètement il n'existe aucun consensus avéré qui ne se fondât sur le Coran ou des hadiths indiscutés.
C. Effet Historique de la Psychologie de groupe sur le Fiqh :
Les fondements psychosociaux des premières générations et des groupucules hétérodoxes ayant surgi lors de l'expansion du monde musulman ont laissé des marques profondes dans le processus de cristallisation de l'islam. En effet, en premier lieu un groupuscule nommé harrourites qui sera nommé kharéjite par la suite, ensuite une mouvance s'opposant au kharéjisme nommée murjiisme ont influencé insensiblement l'expansion des usages non orthodoxes. Le mutazélisme et le jabrisme allaient de même conduire les ulémas à renoncer à rechercher les finalités (masˁlaħah wa'l mafsadah) des interdits et des choses permises, structurant en profondeur le fiqh islamique. Ces mouvances allaient ainsi conduire à la mise en place d'une approche sclérosée de la sunnah du Prophète qui était étrangère aux sahabas et susciter la transmission d'une approche hétérodoxe de la sunnah dans les couches populaires. Une méthode de transmission des hadith non pas textuellement mais avec ses propres mots (bi'l maʔnā) de façon décontextualisée, associée à la crainte de les interroger allait conduire à leur augmentation en nombre. La crainte de les interroger allait d'autre part graduellement les éloigner de leurs sens primitifs et conduire à une inflation en nombre des hadiths de plus en plus imposant. Un seul hadith pouvant être réinterprété, démultiplié, chaque hadith obtenu étant à son tour relu et réinterprété en cascades.
D'autre part, avec la démultiplication des écoles de doctrines et de jurisprudence, et la quête d'enregistrement des règles pour les sujets les plus infimes, la cohésion sociale dérivait vers des fractures semblant inévitables. Il apparaissait un taux croissant de contradictions jurisprudentielles d'une écoles à une autre. Les point de vues les plus rigoureux étant, comme mentionné plus haut, mis en avant au détriment des approches les plus souples dans un concours de piété exacerbé par l'éloignement de l'époque du Prophète et des premiers témoins susceptibles de pouvoir empêcher les dérives et éliminer les craintes gênant l'analyse sobre et lucide des textes fondateurs. Or ce déroulement semblait décidément inévitable, et le point le plus étonnant dans ce processus consiste en ce concours de circonstances imparable. Au point que seulement quatre des écoles seront officialisées au détriment des nombreuses autres dans une tentative d'endiguer ce processus. Pourtant, la source du problème consistait en la recherche de règles systématiques touchant absolument tous les aspects de la vie et des moyens de contraintes morales ou punitives, là où l'usage du temps du Prophète abandonnait ceux-là à un islam intérieur que nul ne devait espionner ou même juger. En fin de compte, les points sur lesquels le Prophète avait institué un moyen de contrôle et de contrainte consistant en, tout au plus, sept ou huit domaines (1/atteinte à l'intégrité physique ou 2/à la vie, 3/fornication, 4/vol, 5/brigandage, 6/ faux témoignage, et peut-être aussi 7/apostasie suivie d'une attaque armée contre les musulmans, et 8/la consommation d'alcool), avec le temps les personnes refusant de payer la zakat, ou de jeûner le mois de Ramadan, prenant des pots-de-vin et encore pour ainsi dire pour tous les aspects de la vie tenues pour recommandées ou prohibées, les décrets et avis des anciens allaient être élevés au même statut que les commandements du Prophète en personne. C'étaient justement ces règles qui allaient creuser les fossés entre les écoles de jurisprudence qui ont figé la jurisprudence islamique dès le second siècle. Ce qui était considéré comme souhaitable par un savant d'une école allait pouvoir être puni par un savant d'une autre école. Et en fin de compte, même les divergences relevées chez les sahabas eux-mêmes allaient ainsi finir par être sévèrement réprimés en sorte de céder systématiquement en faveur des points de vues les plus sévères et radicaux, même quand aucun verset ou hadith reconnu à l'unanimité ne pouvait être soumis pour justifier une telle dérive.
D. Les Sahabas, les Ulémas et l'Infailibilité : Nous lisons des exemples d'erreurs de Sahabas corrigés par le Prophète dans le ouvrages d'histoire et les collections de hadiths, or, même la remise en question des savants se révèle désormais très fastitidieuse dans le monde musulman. Le fait que le Prophète ait corrigé et repris des sahabas par moments est la preuve qu'en matière de religion celui-ci seulement devait consister en une autorité ultime. Et de fait, l'homme éprouve beaucoup de difficultés à remettre en question toute pratique bien ancrée, et ce y compris en dehors du domaine du religieux, en sorte que cela constitue la marque visible et une conséquence de la psychologie de groupe. Au point que même quand une pratique bien ancrée s'avère néfaste par la médecine et la science, les intellectuels osant une remise en question en la matière sont confrontés à une ravageuse opposition et sont marginalisés par des pairs.
E. La Cause de l'Emergence des Ecoles de Jurisprudence :
Avec l'effet puissant du temps, nombre d'usages et coutumes s'ancrent au point que nous finissions par en oublier la causalité fondatrice. La jurisprudence et les écoles non plus ne dérogent pas à cette règle. Lorsque nous nous interrogeons sur la raison de l'existence des écoles de jurisprudence, rares sont les personnes qui proposent une réponse pertinente. Dans ce cas, pourquoi les écoles existent-elles, et pourquoi le fait de considérer celles-ci comme inutiles soulève tant de craintes ?
Afin de donner une réponse à cette question cruciale, il nous font remonter à la source de la naissance de ces écoles. Du vivant du Prophète, il n'existait qu'une seule et unique autorité ultime : le Prophète, et de fait les révélations. Lorsqu'il y avait une interrogation ou un litige on recourait à son décret et celui-ci devenait tranchant et indiscutable. Ainsi, face à toute situation une solution prophétique satisfaisante demeurait accessible. Néanmoins, pour toute situation une réponse spécifique particulière était naturellement donnée, et les Sahabas qui étaient témoins de certaines de ces interventions les appliquaient pour eux-mêmes dans les situations qu'ils estimaient similaires : telles qu'elles ou par syllogisme.
Cependant, le contexte social et anthropologique de Médine et du Hijaz était naturellement limité et confiné, et un certain temps après le décès du Prophète la situation allait changer : de nombreuses peuplades de culture différentes allant s'intégrer dans le monde musulman. Et ainsi, des situations nouvelles étrangères à celle du Hijaz du temps du Prophète allant soulever de nouvelles interrogations.
Les usages enregistrés par les Sahabas selon leurs propres besoins du vivant du Prophète allaient devenir de plus en plus difficiles à comprendre quant à leur causalité et contextes initiaux, tandis que la présence des uns dans un cas et non dans un autre similaire mais différent à certains égards suscitait des hésitations sur la cause d'apparentes divergences : conduisant les savants étrangers aux événements fondateurs de ces usages à rechercher presque systématiquement des abrogations.
Les tentatives de générer des réponses à des conditions illimitées sur fond d'un nombre limité de versets et de hadiths aboutissant à l'élaboration de conventions (usˁūl) et de principes (qawāʔid). Les hadiths qui étaient en nombre finis allaient être reformulés lors de leur transmission selon le sens qui y était recherché dans la quête de la résolution de nouvelles interrogations, en sorte que leur nombre allait constamment croître. Ainsi, pour établir la cause et les raisons de ceux-ci il devenait impératif de statuer sur des conventions et principes plus généraux et globaux. Ces conventions allant graduellement évoluer en degré de sophistication, et s'achever avec la naissance d'écoles différentes.
F. Taqlīd d'une Autre Ecole, une Issue Salutaire :
Désormais, tout savant émettant un avis se devait de se résilier aux voies tracées par ses prédecesseurs. Les savants de l'Iraq suivront désormais les variantes des hadiths de leurs savants, ceux du Hijaz ceux des leurs. Quoi qu'il soit tenu pour acquis qu'un savant gagne une bonne action céleste en cas d'erreur et deux en cas de justesse, il va de soi qu'émettre des avis à tout va était de fait intolérable. De ce fait, pour qu'une erreur d'appréciation soit acceptable, il fallait que cet opinion soit indexé sur une démarche méthodologique rigoureusement cohérente.
Harun al-Rachid (763-809) est le Calife sous lequel les quatre des écoles de jurisprudences encore existentes ont été officialisées au détriment de toutes les autres. Sur l'image, une ambassade Franque visite le Calife à Baghdad.
L'effet de plus de mille quatre cent ans durant lesquels des milliers de savants allaient se fonder sur ces écoles canoniques, allait engendrer de lourdes difficultés à sortir hors des conventions bien rôdées des écoles canoniques. Comment une personne, aussi savante puisse-t-elle être, pourrait déserter des conventions et fondements qui ont été expérimentés et soutenus pendant un millénaire et demi, en élaborant une démarche méthodologique fondamentalement différente, aussi cohérente et globale fût-elle ? Comment pourrait-il s'éloigner de milliers, de dixaines de milliers de savants ?
C'est pour cette raison que lorsque les savants autorisaient même de suivre un avis (raʔy) ou un décret (iʤtihād) d'une des trois autres écoles, ils imposaient de se plier à tout ce qui dans cette école était exigé en corolaire au domaine que l'on souhaitait suivre (pex. celui qui voulait prier selon les règles d'une autre école, devait se plier aux règles des ablutions, du lieu de prière admis, de l'école suivie..). Le but en ce critère étant donc bien la cohérence de la méthode suivie en la matière dans son ensemble. Sachant qu'il y avait chez les premières générations deux types de juristes : le Muʤtahid Mutlaq ou Complet (qui émettait des avis sur l'ensemble des domaines du fiqh), et le muʤtahid simple qui émettait des avis ponctuels sur des sujet particuliers. Il était ainsi exigé de se plier aux règles liés au domaine que le fidèle devait suivre pour des raisons pratiques (pex. le contact de la peau avec une femme rompant les ablutions selon le chaféisme, un chaféite pouvait suivre lors du pèlerinage le rite hanafite sur ce point). Le but étant la cohérence de la démarche suivie devant permettre au fidèle et aux savants émettant les recommandations de se justifier devant le Seigneur en cas de déduction erronée. Cette cohérence étant le justificatif devant garantir le pardon des fidèles en cas d'erreur. C'est en cela que consistait la sagesse de se plier aux détails (furūʔ) en même temps qu'aux généralités (usˁūl) en suivant une autre école par taqlīd.
Finalement, se conformer aux usages des écoles dévolues qui étaient fondés et qui consistaient en des différences archaïques retenues du premier islam, n'est-elle donc pas plus judicieux que d'émettre une fatwā nouvelle et ponctuelle ? Puisque, tandis qu'une fatwā se fonde sur un seul ou sur un nombre restreint de savants, le taqlīd était renforcé par l'avalisation de milliers de savants d'accordant sur le point qui nous intéresse. Biensûr, les divergences internes au sein de sa propre école resteront préférables en cas de contrainte (dˁarūrah), pour les mêmes raisons de cohérence.
G. Les Ecoles Primordiales, un Côté Oublié des Collections de Hadiths :
Dans ce cas, que pouvons nous dire au sujet du taqlīd des écoles primordiales dévolues après la réforme de Harun al-Rachid instituant quatre écoles comme seules écoles officielles (pex. celles d'ibn Abbas, de Sufyan al-Thawri, Hassan al-Basri, al-Layth, ..., .) ? En effet, quoi que ces écoles primordiales divergent des écoles canoniques à de nombreux égards sur le plan des usˁūl et des qawāʔid, il demeure inacceptable de les récuser sur base des conventions des écoles restantes officielles. Par conséquent, se conformer à des avis d'une de ces écoles primordiales devrait être conforme aux critères de cohérence. Tout comme le rite hanafite ne peut pas, par exemple tenir une règle du rite malékite comme une erreur, les écoles restantes ne pourront jamais avancer démontrer l'erreur d'une des écoles primitives désuètes. Cette apparente unanimité sur les quatre écoles restantes consiste en une unanimité fausse ou sukuti. Or, il est remarquable qu'il existe dans les écoles primordiales tombées dans l'oubli de l'islam primitif tant d'avis et décrets qu'il se révèle presque toujours inutile d'émettre des fatāwa si on s'appuie sur les règles de celles-là.
Sans aucune exagération, nous pouvons affimer que tout avis contenus dans chaque hadith retenu dans al Kutūb-i sitta, et même des Kutūb-i Tisʔa consistaient, à la seule condition d'être sahih, en des usages et pratiques orthodoxes applicables au sein de l'islam primitif. Car, quoi que les hadiths aussi aient été en parrallèle soumis à des critères de sélections de plus en plus sévères, il ne faut pas perdre de vue que -et les quatre écoles restantes y sont incluses-, il n'était pas scrupuleusement exigé de se conformer aux règles des sciences du hadiths en matière de fiqh, puisque même certains hadiths sans chaîne de transmissions étaient parfois invoqués dans le cadre des émissions d'avis et des iʤtihādat. En fait, la majorité des muħaddiθīn, durant les premières générations se contentaient de ce qu'un rapporteur de hadith n'aie simplement pas été critiqué comme non fiable pour admettre ses hadiths. Ainsi, chaque rapporteur contenu dans les isnâds consistaient en des savants de référence des écoles primordiales, mais qui ont pour la plupart été abandonnés au fil du temps.
Il ne faudrait surtout pas que les lecteurs pensent que nous soutenons ici que tout fidèle doive prendre n'importe quel hadith et l'appliquer tel qu'il le comprend. Nous avons plus haut mentionné les causes de la nécessité de se conformer à une école bien ancrée. Notre intention ici, est de montrer combien l'islam primitif a dérivé progressivement vers une forme de plus en plus rude, et d'expliquer comment nous en sommes arrivé à nous retrouver avec quatre écoles bien définies. Et plus important encore, nous avons souhaité exposer aux savants confrontés à émettre des avis ou à des muqallid souhaitant suivre un autre avis ponctuel d'une autre école, qui sont tous confrontés à la sévérité des avis des écoles canoniques et à la complexité de la méthode aboutie des écoles officielles : une démarche souple conforme aux règles fondamentales de la jurisprudence qui consiste à s'appuyer sur les avis des écoles primordiales tombées dans l'oubli. Cepenant, les fidèles ne maîtrisant en aucune façon les règles du fiqh ou du hadith n'ont pas d'autre solution que de se référer à plus savant qu'eux. En résumé, tous musulman ayant un acquis savant recquis [1], plutôt que de demander une fatwā, devrait selon notre avis privilégier la recherche des avis parmi les écoles primordiales, si un avis est puisé dans les classiques du hadith celui-ci est muʔtabar (reconnu), à condition qu'il y aie une contrainte néanmoins, mais précisons que ceci n'est pas une fatwā.
H. Notion de Juriste Intérgal et Effets sur le Taqlīd :
Il existe une notion à bien cerner en la matière de taqlīd et c'est la notion de Muʤtahid Mutlaq, différent des autres muʤtahidīn. Nous avons insisté plus haut sur la nécessité de la cohérence de la méthodologie pour qu'un avis erroné puisse être accepté comme islamiquement valide. Puisque sans se conformer en des règles rigoureuses, nous n'aurions aucune garantie de ne pas avoir procédé selon nos attentes et passions en émettant des avis. Rappelons-nous, certains savants privilégient en cas de conflit entre un xabar āħad et un hadith mutāwatir, une analogie (qiyās) qui s'appuie sur le hadith mutāwatir plutôt que sur le hadith āhad isolé. C'est du fait des bifurcations méthodologiques de ce type des quatre écoles, dans les fondements de leurs démarches, -quoi que convergents dans beaucoup de domaines vers des avis similaires-, nous trouvons parfois les avis des différentes écoles considérablement éloignées les unes des autres : lorsque nous obtons pour le taqlīd, il faut tenir cela en mémoire.
Il demeure que, les différences figurant au sein des diverses variantes des hadiths que nous avons mentionnées plus haut, du fait que les avis et interprétations des transmetteurs ont fait corps avec le corpus des récits, consistent en des dérogations que nous pourrons ne pas soumettre aux critères de cohérence globales des muʤtahidīn complets. Du fait que ces hadiths consistuent une source en amont du travail des muʤtahids, ils ne répondent pas aux mêmes règles de cohérence en matière d'opinion, d'avis juridique de qawāʔid et d'usˁūl.
De même, le fait de ne pas maîtriser les qawāʔid et usˁūl sous-jascents des hadiths émanant des écoles primitives désuètes, ne constitue nullemet un obstacle au taqlīd (à condition d'être contraint de s'y conformer). Il n'est pas justifié d'exiger du muqallid et des savants contemporains de maîtriser les méthodes de toutes les écoles primordiales du paleo-islam, et il est naturel de se conformer aux avis des pieux devanciers des premières générations et cela à plusieurs égards.
1. Du point de vue de l'Istisħāb.
2. Du fait que cela soit préférable à l'émission d'un opinion personnel sur un sujet.
3. Du fait que cela est connu comme ayant été pratiqué dans l'islam primitif : car le suivi de l'exemple des premières générations est une règles fondamentale en islam [2].
4. Du fait que les premiers étaient plus fiables que les suivants,
5. ...
I. Méthode juridique et Logique Formelle :
Le point central en jurisprudence est la notion de cohérence et de consistance. Sur ce plan, la logique formelle peut servir à fonder le fiqh islamique sur des bases strictement vérifiables. Voir Analyse rigoureuse et formelle du fiqh.
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[1] La maîtrise de la langue arabe, être apte à lire et critique le hadith source, connaître les divergences des écoles sur le sujet, connaître ce qui a été dit au sujet de ce hadith, maîtriser les règles de fiqh d'au moins une école, ...
[2] "Et ceux qui ont cru, émigré et lutté dans le sentier d'Allah, ainsi que ceux qui leur ont donné refuge et porté secours, ceux-là sont les vrais croyants : à eux, le pardon et une récompense généreuse.." (Anfâl, 74).
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