mardi 31 janvier 2012

I. Paléo-Islam et Critique-Historique





Bonjour. Dans ce blog, je vais traiter de l'islam primitif et écrire à son sujet suivant les méthodes académiques modernes et la critique historique.

Le livre :  Paleo Islam.




I-1. Les Progrès en Linguistique et en Sémantique Cognitive : 

Les progrès considérables en linguistique et en sémantique cognitive ont permis de révolutionner la critique historique. La prise de conscience de la place de la dérive sémantique et de la cognition humaine dans la perception du monde nous a ouvert de nouvelles fenêtres inédites sur notre vision de l'histoire. Il serait bien vain d'ignorer ainsi la synchronie et la diachronie dans l'étude des récits anciens, de négliger la réinterprétation perpétuelle des témoignages anciens à travers le prisme socio-anthropologique de l'époque dans laquelle nous vivons. Or, les textes fondateurs, et les ouvrages classiques anciens n'échappent pas à cette dérive et ces interprétations continuelles, en sorte que l'islam aussi se révèle, lors d'une étude historico-critique rigoureuse, s'être graduellement éloigné de sa forme primitive.





I-2. Critique Interne et Critique Externe :
 
La transmission des hadiths par leur sens (riwāyah bi'l māˤna) ou avec des rajouts (idrāʤ) au fil des générations a conduit à une augmentation numérique des hadiths. Nous allons au gré des articles montrer comment les méthodes modernes de critique interne et externe des sources et la critique historique permettent de reconstituer les récits sur base de l'analyse systématique des variantes, et voir comme les usages et coutumes ont influencé le paléo-islam et en ont graduellement éloigné les populations musulmanes au fil du temps et des changements de contextes socio-anthropologiques.


I-3. Islam Intérieur et Contexte Socio-Anthropologique :

La conception plus intérieure et spirituelle de l'islam de l'époque de Muhammad, a en effet progressivement évolué au fil des conditions socio-politiques vers une approche de plus en plus temporelle ; la croissance démographique et les conflits politiques ont conduit l'islam a évoluer insensiblement vers un système de plus en plus orthopraxique. Dès l'époque d'abū Bakr débutèrent ainsi des conflits comme le refus de payer la zakāt. Umar ibn al-Khattab, initia sous son règne des réformes profondes changeant considérablement le visage de l'islam politique. De même, à l'époque d'Uthman ibn Affān, d'Ali ibn abī Tālib et de Mu'awiya, des concepts théologico-politiques de plus en plus marqués s'instituèrent, entérinant des usages en vigueur comme des valeurs proprement islamiques, extrapolant d'autre part le moindre fait et geste du Prophète à des situations de plus en plus éloignées de leur contexte originel, pour y rechercher des règles absolues. Il est notable, qu'il n'est pas exact de parler d'un état dans le sens moderne pour l'époque du Prophète. Et ce, même si celui-ci était un leader charismatique gérant dans les faits l'économie, les conflits militaires ou les litiges en sorte d'instituer des valeur supra-tribales de plus en plus étendues. En réalité, les problèmes ressortent comme étant résolus de façon ponctuelle, sans véritablement instaurer un état structuré, dans le sens moderne du terme.

Certes, le Prophète fera fabriquer un sceau pour rédiger des lettres officielles à plusieurs dirigents d'états, mais pour autant son pouvoir était davantage céleste que matériel. Ainsi abū Sufyān aurait dit à Ali, en voyant les troupes musulmanes encerclant la Mecque, que le fils de son oncle a institué un grand royaume, et Ali lui aurait répliqué : "C'est là un règne prophétique, non un royaume". Lorsque les musulmans augmentèrent en nombre, de nouvelles populations et groupements ethniques s'ajoutant à la communauté grandissante, de nouvelles appréhensions de l'islam se mirent à influencer progressivement l'évolution de l'islam. Il semblerait que c'est du temps d'Umar qu'un état commença à véritablement se constituer. La notion de sunnah aussi s'installera dans son sens moderne vers cette période (tandis que ce terme signifiait jusque là un concept plus diffus, comme les notions de bonne sunnah ou mauvaise sunnah, ainsi que de bonne bidˤah ou mauvaise bidˤah ou "innovation"). Les premières générations parlaient ainsi bien de sunnah des Califes, des chrétiens, ou même de Dieu. Autrement dit, la signification originelle du terme sunnah qui dans l'esprit des plus anciens Sahabas signifiait l'idée de règles, usages et coutumes à suivre (maʔrūf, ce qui est connu), la notion de sunnah et de charia commencèrent à se concevoir davantage dans leurs formes que dans leurs fonds. Cherchant désormais à fonder toute chose sur une sunnah, considérée comme auto-suffisante. Ainsi, la maîtrise de la finalité des pratiques du Prophète par les anciens Sahabas, ayant été témoins des événements fondateurs depuis le commencement, cédait progressivement la place à une approche plus superficielle chez les jeunes Sahabas.


I-4. L'Influence Prépondérante de la Seconde Génération :

Ainsi, l'influence prépondérante des jeunes Sahabas qui étendaient la moindre parole ou action du Prophète à des situations de plus en plus éloignées du contexte originel par extrapolation, conduisait l'islam à s'éloigner de sa simplicité et son naturel primitif, pour prendre une apparence orthopraxique qui sera de plus en plus caractéristique. Or, les Sahabas qui institueront le nouvel islam ne maitrisaient pas la causalité et les finalités des agissements du Prophète car ils étaient trop jeunes du vivant de celui-ci. ibn Umar, qui est l'une des personnes les plus influentes dans l'institution de l'islam d'après Muhammad, est ainsi né en 614 ayant ainsi tout juste 18 ans  au décès du Prophète, Abdullah ibn Abbas étant né en 619 en avait alors seulement 13, et Abdullah ibn Zubayr né en 624 -soit deux ans après l'hégire- avait à peine 8 ans, tandis qu'abu Hurayra né en 603 avait rencontré l'islam lors de l'assiègement de Khaybar en 628 âgé de 30 ans et n'a véritablement fréquenté le prophète que quatre ans environs... Dans ce blog, nous allons nous pencher et analyser cette évolution islamique constituant une charnière dans l'histoire du monde musulman. 




Sur la carte ci-dessus, nous voyons l'extension du monde musulman du foncé vers le clair; depuis l'époque du Prophète décédé en 632 (vert le plus foncé), des quatre Caliphes entre 632-661 et en vert clair les régions islamisées à lépoque des omeyyades entre 661-750. Comme nous pouvons le voir, seulement une trentaine d'années après le décès du Prophète le monde musulman s'étendait et incluait déjà de nombreuses populations diverses de cultures très variables, ce qui ne pouvait qu'influencer la perception de l'islam par régions.

Cette extension rapide a conduit naturellement à l'apparition de situations nouvelles à mesure de l'éloignement du contexte socio-économique de Yathrib du temps du Prophète, la zakāt, les résolutions de litiges limitées à la situation de Yathrib et la tendance des jeunes Sahabas de rechercher absolument un fondement dans les usages du Messager pour toute situation nouvelle, jouait ainsi un rôle central dans la transmission des hadiths avec des interpétations propres, conduisant à leur démultiplication les éloignant de plus en plus de leur version originelle, et les version transmises selon les interprétations personnelles étant à leur tour également interprétés et transmis encore suivrant d'autres variables. Cela conduisit par conséquent à une démultiplication des hadiths, et des approches jurisprudencielles, en sorte qu'il ne restait strictement aucun sujet qui fasse l'unanimité. Et du temps de Hārun al-Rachid, quatre écoles considérées proches les unes des autres furent canonisées. De cette façon, une personne s'appuyant sur une fatwa d'un savant ne se trouvait plus condamné par un autre savant de vision opposée. Dans ce blog, nous allons rédiger des articles et analyser ces étapes selon la méthode historico-critique, la contextualisation socio-anthropologique et présenter l'islam primitif de façon critique et vérifiable.





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