A. Mariage et Coran :
يا أيها الناس اتقوا ربكم الذي خلقكم من نفس واحدة وخلق منها زوجها وبث منهما رجالا كثيرا ونساء واتقوا الله الذي تساءلون به والأرحام إن الله كان عليكم رقيبا ) 1 ( وآتوا اليتامى أموالهم ولا تتبدلوا الخبيث بالطيب ولا تأكلوا أموالهم إلى أموالكم إنه كان حوبا كبيرا ) 2 ( وإن خفتم ألا تقسطوا في اليتامى فانكحوا ما طاب لكم من النساء مثنى وثلاث ورباع فإن خفتم ألا تعدلوا فواحدة أو ما ملكت أيمانكم ذلك أدنى ألا تعولوا ) 3 ( وآتوا النساء صدقاتهن نحلة فإن طبن لكم عن شيء منه نفسا فكلوه هنيئا مريئا
(4:1-4) : "Ô les gens ! Craignez votre Seigneur qui vous a créés d’un seul être, et a créé de celui-ci son épouse, et qui de ces deux là a fait répandre (sur la terre) beaucoup d’hommes et de femmes. Craignez Allah au nom duquel vous vous implorez les uns les autres, et craignez de rompre les liens du sang. Certes Allah vous observe parfaitement. Et donnez aux orphelins leurs biens; n’y substituez pas le mauvais au bon. Ne mangez pas leurs biens avec les vôtres: c’est vraiment un grand péché. Et si vous craignez de n’être pas justes envers les orphelins,... Il est permis d’épouser deux, trois ou quatre, parmi les femmes qui vous plaisent, mais, si vous craignez de n’être pas justes avec celles-ci, alors une seule, ou des esclaves que vous possédez. Cela, afin de ne pas faire d’injustice (ou afin de ne pas aggraver votre charge de famille). Et donnez aux épouses leur mahr, de bonne grâce. Si de bon gré, elles vous en abandonnent quelque chose, disposez-en alors à votre aise et de bon cœur."
Le Coran n'exige pas de témoins au mariage. Les conditions coraniques du mariage sont l'accord et la dot. Les usages consistant à l'annonce de l'union, faire une fête en coupant un mouton sont encouragés mais pas des conditions pour la santé du mariage islamique.
al-Bukhari rapporte que le Prophète autorisa à un homme d'épouser une femme avec pour dot une bague en acier.
B. Le statut des hadiths exigent deux témoins au mariage :
B.1. Le hadith suivant ibn Abbas vient via Qatada étant une parole propre d'ibn Abbas.
B.2. Un autre hadith selon ibn Abbas parfois soutenu comme fiable et mawquf dit : "pas de mariage sans preuve". Or, cette parole est d'ibn Abbas et non attribuable au Prophète.
B.3. Le hadith selon Aïcha, provient par trois voies contenant des failles. Une quatrième voie est rapportée par Daraqutni, qui contient également abu al-Hasib Nari ibn Maysara qui est rejeté par les spécialites du hadith.
B.4. Le hadith selon imran ibn Hussayn contient dans sa chaine de transmetteurs Abdallah ibn Muharrar qui est rejeté par les spécialistes du hadith.
B.5. Le hadith selon Said ibn Jubayr est mawquf et ne remonte pas au Prophète. Il nous est parvenu par une autre version marfu, qui contient dans sa chaine de transmetteurs Adiyy ibn Fadl qui est rejeté également.
B.6. Bayhaqi a recensé encore une autre version, mais la chaîne de transmetteurs contient Mughira ibn Musa al-Asri qui lui aussi est rejeté.
Certaines personnes citent pour exiger deux témoins lors du mariage al-Bukhari. Or la référence qu'ils donnent dans son Jami'ul Sahih rejète précisément cette condition comme nécessaire.
C. Mariage de Muhammad avec Maymuna :
Maymuna avait épousé dans la période préislamique Mas’ud ibn Amr as-Saqafi et son époux s'en sépara. Ensuite elle épousa abu Ruhm ibn Abduluzza qui décéda.
En l'an six de l'hégire, une convention avec les Mecquois avait été convenu à Hudaybiyya. Selon cet accord, les musulmans allaient quitter la Mecque sans faire leur pèlerinage cette année-là.
L'années suivante au mois de Zhilqada, le Prophète sortit en direction de la Mecque en vue d'un pèlerinage. Lorsqu'il sortit de l'état de sacralisation, il proposa le mariage à Maymuna. Qui l'accepta et fit parvenir la réponse via ibn Abbas.
Ils sont ensuite restés à la Mecque trois jours, et un groupe arriva avec Huwaytib ibn Abduluzza dira au Prophète : “Ton délai est achevé, quitte la Mecque à présent !”
Le Prophète répondit :“Si vous m'accordiez un délai, que je fasse une réception en sorte que vous dîniez en notre compagnie pour le mariage".
− “Nous n'avons nullement besoin de ton invitations va-t-en.” dirent-ils. Sur quoi, ils firent leurs préparatifs et sortirent pour Yathrib. A neuf miles de la Mecque, ils consommèrent le mariage. (Hakim, Mu’jamu’l-Kabir, Haythami.)
Nous constatons que le Prophète ne cherche nul témoin pour ce mariage. Car un tel usage n'existait pas encore. De même, il n'est rapporté aucun cas de recherche de témoin pour un mariage du temps de Muhammad. Quant au rituel de demande de la main, cela se pratiquait, mais pas de façon systématique. Le Prophète dit à ce propos : "La bikra (البكر) ne peut être mariée sans son gré, quant à la thayyiba (الثيب) elle est plus amème de juger pour elle-même qu'un tuteur". Les termes البكر et الثيب sont traditionnellement interprétés comme vierge et divorcée. Or, البكر signifie "celle qui n'apporte pas" soit "pas réglée", et الثيب désigne au contraire la fille "prête à se reproduire", "emplie et prête à pleuvoir". Chez les Arabes la jeune fille était mariée très jeune, dès qu'elles commençait à prendre des formes, sans attendre le début des règles forcément. Ainsi, le terme الثيب prit le sens de "déjà mariée et divorcée" comme il était exceptionnel de trouver une femme vierge adulte à l'époque chez eux. Ainsi, abu Hanifa expliquait le terme الثيب comme désignant la femme mature vierge ou non.
L'Imam Nasai rapporte à ce sujet ce récit révélateur : Un Ansarite nommée Hansa, fille de Hidama vint chez Aïcha pour se plaindre : “Mon père m'a mariée avec son neveu pour s'enomblir. (Hansa en désirait un autre.) Mais je ne le voulais pas.” Aïcha lui dit : “Patente jusqu'à la venue du Messager.” et la fit s'asseoir. Quand le Messager arriva, Aïcha lui expliqua son problème. Le Messager fit venir immédiatement le père de la fille. Et laissa à la fille le droit de choisir. Sur ce, la fille dit au Prophète : “Ô Messager ! J'accepte ce mariage de mon père. Je voulais montrer que les filles ont le droit de choisir.”. (Nasai, Nikâh) Selon le rite hanafiste, dans le principe, l'accord du tuteur n'est pas une condition de l'authenticité du mariage.
Selon le rite hanafiste, l'autorisation du tuteur pour le mariage de la fille vierge n'est pas une condition du mariage mais souhaitable. De même, selon un des avis de l'école malékiste, si la fille n'est pas pieuse, l'autorisation parentale n'est pas exigée pour la validité du mariage. Par ailleurs, l'école malékiste, qui rappelons-le se fonde sur les usages des gens de Médine n'exige pas de témoin lors de l'acte de mariage et exige seulement d'annoncer le mariage. Cela est un artéfact de l'usage dans l'islam primitif dont Malik ibn Anas était témoin encore à son époque.
D. Annoncer et fêter le mariage était conseillé par le Prophète :
"Annoncez les mariages" (Ahmad, Musnad ; sahih selon ibn Hibban ; al-Bazzâr, Musnad...)
"Fêtez vos mariage, ne fût-ce qu'en coupant un mouton."
- Ces choses ne sont pas obligatoires, mais conseillées. L'Imam Malik et d'autres juristes ont en effet considéré ces points comme non obligatoires, mais souhaitables.
E. Autres aspects :
Nous avons déjà abordé la question de l'autorisation du tuteur dans le mariage et nous reviendrons sur la question des témoins du mariage plus loin dans un autre article. Les rituels de demande en mariage sont de même des usages Arabe qui ne sont pas fondés sur une règle coranique ou prophétique à proprement parler non plus. Les festivités du mariage ne sont pas non plus une condition de la licéité du mariage. En fait, les seules conditions de l'authenticité du mariage islamique consistent concrètement en l'accord entre les futurs mariés et le don de la dot convenue par la femme.
F. Le processus de l'entérinement d'usages comme des critères religieux :
Les anciens ont exigé une série de critères pour l'authenticité du mariage en islam, afin de pouvoir discriminer un mariage d'un cas de fornication. L'accord du tuteur de la fille vierge, deux témoins, l'annonce du mariage, les festivités, la fixation de l'acte de mariage par écrit, cohabiter ensembles, ... Ces règles ont été imposées comme impératives de sorte à distinguer un acte de mariage d'un cas de fornication. Le mariage de jouissance qui était pratiqué par les Sahabas jusqu'à l'époque de Umar, fut condamné par le caliphe à la suite d'un litige confrontant une femme tombée enceinte suite à un mariage temporaire. Mais, la pratique du mariage de jouissance jusqu'alors démontre formellement autre chose : les critères sus-mentionnés n'étaient nullement exigés de façon impérative jusqu'à cette époque dans l'islam primitif. Le fait même que le mariage de jouissance ait été pratiqué au moins jusqu'à l'époque d'abu Bakr montre de façon formelle que les seules règles du mariage indispensables pour l'authenticité du mariage dans l'islam primitif consistaient en l'accord des couples et le don de la dot. Toutes les autres pratiques, comme l'annonce, les festivités, témoins, droit du tuteur étant donc souhaitables mais non obligatoires. Ainsi, le Coran conforte littéralement et nommément le mariage de jouissance ; (4:24) : "Parmi les femmes, les dames (qui ont un mari), sauf si elles sont vos esclaves en toute propriété. Prescription d’Allah sur vous ! A part cela, il vous est permis de les rechercher, en vous servant de vos biens et en concluant mariage, non en débauchés. Et quand vous contractez le mariage de jouissance, donnez-leur leur mahr comme une chose due. Il n’y a aucun péché contre vous à ce que vous concluez un accord quelconque entre vous après la fixation de la dot." Par ailleurs, ce verset légiférant le mariage de jouissance parmi les mariages permis, ne délimite pas les conditions permises suite au contrat de mariage et lie, comme nous l'avons vu dans un autre article les parties tant que ces conditions ne contreviennent pas à des règles islamiques. Or, les conditions ultimes nécessaires et suffisantes sont l'accord des deux parties et la dot.
G. La simplicité du mariage traditionnel paleo-islamique :
Selon les usages, la demande d'une femme chez ses tuteurs était pratiquée, parfois par l'intermédiaire d'une tierce personne, et si le tuteur donnait son accord le couple était considéré comme officiellement marié à cet instant. La femme fixait la dot qu'elle exige, et cela pouvait consister en une simple bague en acier ou encore mois. Dans le principe, il n'y avait pas de mention de cet acte par écrit, et aucune confirmation administrative quelconque. La similitude de cette pratique avec les flirts contemporains est en réalité frappante, la seule visite du candidat chez les parents de la fille suffisant, et le Prophète ayant interdit aux tuteurs de s'opposer aux choix des filles matures. Pourtant, la phobie de la confusion d'un mariage traditionnel à l'ancienne avec un cas de fornication à conduit les jurisconsultes à compliquer les conditions d'authenticité du mariage à l'absurde, des pages entières étant dédiées aux formules de demandes valabes ou non. ibn Abbas dit ainsi : "Point de mariage sans preuve". Or, la parole d'un musulman est une preuve en islam, et sa parole suffit à le justifier.
H. Travail et cohabitation :
Dans le principe, il n'est pas obligatoire que le jeune époux travaille, ni que les jeunes mariés cohabitent sous le même toit au continu. Si le jeune marié a des parents qui en ont les moyens, ils peuvent s'occuper de leur fils et de son épouse financièrement. Si l'époux accepte cela, son épouse peut fort bien rentrer chez ses parents régulièrement. Ces points ne sont pas exigés pour la santé du mariage en islam.
I. Contrôle des naissances :
Le Prophète a autorisé le contrôle des naissances. Si donc la jeune épouse ne souhaite pas tomber enceinte trop tôt, ils peuvent décider de ne pas faire d'enfant jusqu'à ce connaitre suffisemment.
J. Conclusions :
Aucun hadith fiable remontant au Prophète n'exige de témoin ou l'accord d'un tuteur pour l'authenticité du mariage. Or, nous constatons qu'ibn Abbas évoque dans une version la nécessité d'une preuve. Quant à la version mawquf contenant l'expression : "Pas de mariage sans tuteur", cela a été repris par d'autres voies comme une parole du Prophète.
Ces règles ont été imposées dans l'intention de différencier le mariage d'un cas de fornication ; il ressort nettement qu'ibn Abbas et Said ibn Jubayr (ceux qui sont transmis selon Aïcha ou Imran ibn Hussayn ne remontent pas à ceux-ci de façon fiable) exigeaient une preuve justifiant la réalité du mariage afin de les différencier de la fornication. Or, il est établi que le Prophète cherchait au contraire à repousser la condamnation des adultérins tant que cela se peut. L'idée de vouloir à tout prix châtier les fornicateurs est une innovation étrangère à l'islam primitif. En islam, la parole d'un musulman est une preuve : s'il affirme être marié, alors c'est qu'il l'est. C'est ainsi que le Prophète demandait confirmation aux accusés avant de déterminer s'ils ont commis l'adultère. Autrement, le témoignage d'un musulman ne ferait pas office de preuve en cas de litige.
Il est évident que la règle des deux témoins lors de l'acte du mariage est une reprise des deux témoins exigés selon le Coran lors des transactions commerciales. Cela a au fil du temps conduit à l'élaboration de fausses sources prophétiques instituant une telle pratique. Or, à l'origine, le Prophète n'a nullement exigé de témoin lors du mariage. Le récit du mariage avec Maymuna par courrier en est un exemple bien connu. Et la pratique du mariage de jouissance jusqu'à l'époque de Umar prouve que ces conditions n'existaient pas jusqu'à une époque tardive dans l'islam primitif.
La phobie de la perte de la virginité caractéristique du judaïsme et du christianisme a comme dans d'autres domaines profondément influencé le monde musulman, troublant la pureté et le naturel de la notion du mariage de l'islam primitif relevé du vivant du Prophète. La complexification des conditions du mariage des anciens, cherchant par là à contrôler les cas de fornications, a de nos jours conduit les jeunes à repousser de plus en plus le mariage, craignant les lourds engrenages des procédures de mariage et de séparation en cas de non entente. La nuptialité ne cesse de reculer, et les relations hors mariages sont désormais presque la règle. Or, si la pratique du temps du Prophète étaient pratiqués sans modification, les jeunes pouraient vivre leur sexualité librement en conformité avec les critères islamiques.
Le mariage du temps du Prophète était réellement très naturel et extrêmement simple. Le fait que le Prophète contrevienne au mariage de la jeune Hansa contre son gré avec un autre que celui de son choix témoigne de la sensibilité de celui-ci sur ce point crucial. De même, le fait que le Prophète ait dit que la femme thayyib (mature) est plus amème de savoir qui elle veut épouser -en comparant celle-ci à un nuage prêt à pleuvoir- est un autre témoignage puissant de l'importance qu'il accordait à la sexualité des jeunes. Le fait que le Coran recommande de marier les jeunes orphelins aussi montre l'importance accordée à l'assouvissement de ce besoin biologique vital. C'est bien après Muhammad que la sexualité des jeunes devint progressivement de plus en plus compliquée.
Nous avons de même vu dans un autre billet que la femme n'est pas obligée de travailler en islam, mais en a parfaitement le droit. Et que celle-ci peut poser comme condition lors de l'acte de mariage d'exercer sa profession à son futur époux.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire