lundi 30 janvier 2012

II. Notion de Hadith et Paleo-Islam



A. Introduction :

La place des hadiths en islam est fondamentale et centrale. Nous allons présenter la thèse de doctorat du Dr. Bünyamin Erul touchant la notion de Sunnah chez les Sahabas dans un autre article. Avant cela, nous allons aborder la question de la méthodologie et la critique du hadith. Comment détermine-t-on la fiabilité d'un hadith, que signifie la qualification d'un hadith comme aħiħ ? Quelle est la différence entre le xabar aħad et le ħadiθ mutawātir ? Présentons d'abord la méthodologie du hadith, sans nous étendre sur toutes les subtilités de la méthode du hadith.

Classiquement, un hadith est retenu comme sain (sˁaħiħ) lorsqu'il répond aux cinq critères suivants :

1. Il doit remonter jusqu'au Prophète,
2. Il doit être ininterrompu,
3. Chaque maillon doit être reconnu comme juste par ses pairs*,
4. Chaque maillon doit être reconnu pour avoir une bonne mémoire par ses pairs*,
5. Le hadith ne doit pas comporter une autre défaillance identifiable que ces quatre critères susmentionnés.

* Les pairs, c'est-à-dire des chroniqueurs contemporains qui ont fréquenté ceux-ci dans les cercles des mémorisateurs.



B. Critères d'authenticité fluctuants :

Il est à souligner que la qualification d'un hadith comme fiable ou ahih par un spécialiste ne signifie pas que tous les spécialistes le considèrent également comme fiable. La majorité des spécialistes du hadith considèrent les transmetteurs (rāwi) des chaînes de transmissions (isnād) indéterminés (maʤhul) comme acceptables ; le fait qu'ils ne soient pas répertoriés comme non fiables leur permet de les tenir pour fiables par défaut. Cependant, d'autres spécialistes, à l'instar de Muslim ibn Hajjaj, considéraient par contre ceux-ci comme douteux et n'acceptaient pas leurs hadiths comme fiables. Selon ceux-ci, le fait que ces transmetteurs inconnus ne soient pas identifiés comme non-fiables ne suffit pas à les rendre fiables, et il faut pouvoir identifier chaque maillon de la chaîne de transmetteurs comme fiable. Muhammad ibn Ismail al-Bukhari exigeait par ailleurs, en plus de la nécessité d'identifier tous les maillons comme fiables, de pouvoir confirmer que chaque maillon a bien rencontré au moins une fois le maillon précédant. Ne se contentant pas de ce que leurs dates de naissance et de décès se recoupent juste sur le plan chronologique.

Concept de l'unité - Rendu 3D, cercle de personnes d'origines ethniques différentes, main dans la main. Banque d'images - 9710440 

Si un petit texte est présenté à une personne parmi un cercle de volontaires, en sorte que celui-ci le transmette discrètement dans l'oreille de la personne juste à sa droite, et ainsi de suite jusqu'à ce que le message lui revienne en faisant le tour du cercle, un tel exercice montrera une altération du récit au fil de la transmission. Une telle altération est inévitable lors d'une transmission orale après plusieurs maillons si il n'y a pas de feed-back systématique à chaque étape.



C. Variantes, Xabar Aħad et Mutāwatir :

De par leur transmission interprétative jusqu'à leur fixation par écrit, les hadiths ont dérivé vers de multiples variantes. Ainsi, les hadiths ont formé de multiples versions et variantes et ont augmenté en nombre au fil du temps. Lorsqu'un récit est transmis par différentes voies, il peut par exemple arriver que sept de ces versions se ressemblent, et qu'une huitième version en diffère et reste secondaire (ʃāð) : en sorte que cette version secondaire doive être rejetée, même si la chaîne de transmission est considérée techniquement comme fiable. Autrement dit, la chaîne des transmetteurs est acceptable, mais le contenu sera rejeté. Si le récit parvient pas différentes voies de façon instable, celui-ci sera considéré trouble (muðˤtˁarib), et toutes les versions seront rejetées à défaut de pouvoir les trier en sorte à en mettre un plus en avant. Cependant, si un hadith nous parvient selon un seul Sahaba ou un petit nombre de Sahabas, celui-ci sera tenu pour isolé (aħad). Cela induisant dans sa transmission, une faiblesse. Du fait que celui-ci, quoi que transmis selon des chaînes aux maillons tenus fiables, peut se trouver en principe dans l'état du hadith secondaire (ʃāð) vu plus haut. Pour cette raison, certains savants considèrent ces récits isolés comme non fiables pour fonder des croyances ou doctrines religieuses, exigeant des hadiths mutāwatir.

Mutāwatir signifiant, l'uniformité ou la convergence d'un hadith prophétique transmis par tant de voies différentes, qu'il soit totalement exclu de concevoir un complot à son sujet". Pour qualifier un hadith de mutāwatir, les spécialistes on conçus divers critères. De par le caractère nébuleux du nombre de recoupements suffisant pour qu'une erreur ne puisse pas s'être formée a conduit les spécialistes à exiger que pour qu'un hadith soit tenu pour mutāwatir il faille à chaque maillon, depuis les Sahabas jusqu'à la fixation par écrit, au minimum : 4, 5, 10, 12, 20, 40, 70 ou 300 témoins. La tendance générale étant d'exiger à chaque maillon dix confirmations. On distingue par ailleurs le mutāwatir dans le fond, et le mutāwatir dans la forme. La version dans le fond signifiant le recoupement dans le sens, tandis que le mutāwatir dans la forme doit se détenir avec les mêmes propos. Or, nous ne pouvons trouver aucun hadith mutāwatir dans la forme. Tandis que nous connaissons des mutāwatir dans le fond, quoi qu'en fort petit nombre : variable selon le niveau d'exigence. Certains spécialistes n'exigent pas que les chaînes de transmissions de chacune de ces versions soit fondée comme fiable, et soutiennent parfois un ensemble de récits faibles convergeant vers une même idée comme un cas fiable, voire parfois selon certains : mutāwatir. Cela est, comme la reconnaissance par défaut d'un rawi non identifié comme valable non soutenable, car des usages d'origine exogène peuvent devenir courants sans émaner de l'autorité du Prophète.

Les chaînes de transmetteurs tenus pour fiables les plus courtes qui sont fixées sont composées d'au moins quatre maillons. Ainsi, l'exigence minimale de quatre témoins à chaque maillon pour tenir un récit comme mutāwatir, il faut détenir au minimum 256 variantes suivant la structure (4x4x4x4), toutes détenues avec des chaînes de transmetteurs fiables. En pratique, nous ne détenons aucun hadith répondant à cette exigence minimale stable dans la forme, tandis que les cas de récit se recoupant dans le fond se rapprochent de ce critère minimal, mais avec des recoupements des chaînes les unes avec les autres de façon transversales. Pour cette raison, les spécialistes demeurent très souples dans ce domaine. Si nous prenons pour base, la version théorique de 10 témoins totalement distincts à chaque maillons comme soutenu généralement dans les manuels théoriques, cela nécessiterait 10.000 versions totalement distinctes détenus par respectivement 10 Sahabas, 100 Tabi'i, 1000 Etba'i tabi'i et 10.000 Etba'i atba tous tenus pour fiables : ce qui est de fait improbable. Par contre, si nous acceptons que les chaînes doivent être composées de maillons strictement différents se limitant au nombre des versions, cela devient accessible.

Or, en suivant un raisonnement similaire, certains savants tiennent des hadiths aux chaînes de transmissions faibles voire inexistantes comme aħiħ li-ɣayrihi ou ħassan li-ɣayrihi, ou fiables/bons par défaut, en appuyant le fond par des hadiths tenus pour fiables. Ou parfois même à présenter certains hadiths aux chaînes irrégulières comme mutāwatir. Ou alors, en retenant un tel hadith pour faible suivant une partie de son contenu appuyé par un autre hadith tenu pour fiable, certains en viennent à tenir la partie non fondée de ces hadiths comme également fiable. Pourtant, le fait qu'une partie d'un récit transmis suivant une chaîne irrégulière et douteuse rejoigne un hadith tenu pour fiable, ne signifie pas que la partie non fondée de son contenu en devienne fiable par magie ou contagion. Même si un faisceau de chaînes fiables peut fort bien conforter une chaîne défaillante sur la partie consolidée.

Quand aux chaînes discutées dont les récits convergent, il semble plausible d'en accepter suivant certains critères. Comme le fait que rien ne tende à concevoir que les chaînes se recoupent de façon voilée. Par exemple, si des narrateurs ont été accusés de dissimulations de maillons critiqués tadlīs.



D. Approche mathématique des hadiths :

Il y a un moyen de vérifier la fiabilité des hadiths sur base des mathématiques. En effet, la langue de rédaction des récits est l'arabe, or la langue arabe a la particularité de se composer de racines bi-, tri- ou quadrilitères. Or, il est établi sur base du comptage des racines recensées dans le fammeux Qāmus al Muħīt (XIVeS), qu'il existe au moins 9.273 racines distinctes en langue arabe médiévale [1]. Le nombre de racines en langue arabe au VIIeS pouvant être inférieur, équivalant ou supérieur à celui du temps de la rédaction de ce dictionnaire, or il ne faut pas oublier que la détention matérielle des hadiths est contemporaine de ce dictionnaire de référence susmentionné. Il est intéressant de souligner que le nombre de racines utilisées dans le Coran est de 1.726. Sur cette base, sans même élargir l'analyse à la grammaire ou la syntaxe, il devient possible d'établir un calcul probabiliste sur le niveau de fiabilité d'un hadith, dès qu'il est transmis au moins par deux voies distinctes et indépendantes. Par exemple, une phrase comportant 10 racines identiques transmise par trois voies distinctes et indépendantes les unes des autres a une probabilité de 1/9.27310e3, soit 1/1,039 x 10119 d'avoir pu avoir été imaginé séparément, sur base des racines existantes disponibles en langue arabe selon l'estimation haute (9.273 racines) ou alors 1/1.72610e3, soit 1.292  1097 selon l'estimation basse (1.726 racines). Une telle coïncidence est si faible, que dans le deux cas de figures, il devient évident qu'un tel hadith doit remonter à une source commune, ici, chez le Prophète. Pour avoir un ordre d'idée, il existe 1078 atomes dans l'Univers observable. Et le volume de l'univers observable en nombre de volumes de protons est de l'ordre de 10122.

Sans étendre l'analyse à la structure des récits, sur seule base du nombre des racines, il devient permis de vérifier la fiabilité d'un hadith de façon absolue. Nous pourrions nous interroger sur la prise en compte de la fréquence d'utilisation variable des racines en langue arabe, or, techniquement les hadiths étudiés se trouvent toujours dans le nombre de phases permises à partir de ces racines. La fréquence d'usage des mots change selon l'échantillonnage, le type de textes et les époques. Nous estimons à plusieurs millions de mots existants en langue arabe. Concrètement nous disposons d'au moins 9 273 racines distinctes, déclinables en schèmes sous jusqu'à plusieurs centaines de formes (nom, verbe, adjectif, adverbe, ...). Nous nous situons en amont d'une analyse de la syntaxe et de la grammaire, de l'ordre des racines et de leur organisation, et nous bornons sur des propos originaux et non courants. 

Une autre démarche mathématique consiste à évaluer les termes de syntaxe des 9 273 racines distinctement des autres. Si nous considérons les particules de syntaxe au nombre de 273 [note], pour une phrase de par exemple 20 mots, et 6 particules nous obtenons 9 00014 x 2736 = 1.03*1073. Avec deux voies indépendantes cela donne alors: 1/1.06*10146, et avec trois sources indépendantes, nous arrivons déjà à 1/1,09*10219

Une troisième démarche consiste à simplement ignorer les particules syntaxiques, et juste comptabiliser les mots restants. Pour l'exemple supra, cela donne 1/[(9 00014)2] = 1/5,23 *10110, pour deux voies distinctes et 1/[(9 00014)2] = 1/4,24 *10118 avec trois voies distinctes.

Or, il n'est pas techniquement nécessaire de trouver le nombre de phrases absolues générables en langue arabe pour s'assurer qu'il n'y a pas de coïncidence soutenable dans la répétition d'un hadith de quelques mots, avec des propos originaux, c'est-à-dire non usuels. En effet, la richesse de vocabulaire en langue arabe est très élevée, or, même en nous arrêtant à un seuil bas à l'absurde de 500 racines en tout, avec un hadith d'à peine 3 mots transmis par seulement deux voies indifférentes nous arrivons déjà à une probabilité de 1/1.56*1016. Notre objectif de vérification mathématique est dès lors largement atteint par notre approche. 



D.1. Exemple d'analyse :

(1) Selon Abdallah ibn Mas'ud.

حَدَّثَنَا أَبُو بَكْرِ بْنُ أَبِي شَيْبَةَ، حَدَّثَنَا حَفْصُ بْنُ غِيَاثٍ، وَأَبُو مُعَاوِيَةَ وَوَكِيعٌ عَنِ الأَعْمَشِ، عَنْ عَبْدِ اللَّهِ بْنِ مُرَّةَ، عَنْ مَسْرُوقٍ، عَنْ عَبْدِ اللَّهِ، قَالَ قَالَ رَسُولُ اللَّهِ صلى الله عليه وسلم ‏ "‏ لاَ يَحِلُّ دَمُ امْرِئٍ مُسْلِمٍ يَشْهَدُ أَنْ لاَ إِلَهَ إِلاَّ اللَّهُ وَأَنِّي رَسُولُ اللَّهِ إِلاَّ بِإِحْدَى ثَلاَثٍ الثَّيِّبُ الزَّانِ وَالنَّفْسُ بِالنَّفْسِ وَالتَّارِكُ لِدِينِهِ الْمُفَارِقُ لِلْجَمَاعَةِ ‏"‏ ‏.‏


(2) Selon Aïcha bint abu Bakr :

حَدَّثَنَا مُحَمَّدُ بْنُ سِنَانٍ الْبَاهِلِيُّ، حَدَّثَنَا إِبْرَاهِيمُ بْنُ طَهْمَانَ، عَنْ عَبْدِ الْعَزِيزِ بْنِ رُفَيْعٍ، عَنْ عُبَيْدِ بْنِ عُمَيْرٍ، عَنْ عَائِشَةَ، رضى الله عنها قَالَتْ قَالَ رَسُولُ اللَّهِ صلى الله عليه وسلم ‏ "لاَ يَحِلُّ دَمُ امْرِئٍ مُسْلِمٍ يَشْهَدُ أَنْ لاَ إِلَهَ إِلاَّ اللَّهُ وَأَنَّ مُحَمَّدًا رَسُولُ اللَّهِ إِلاَّ بِإِحْدَى ثَلاَثٍ رَجُلٌ زَنَى بَعْدَ إِحْصَانٍ فَإِنَّهُ يُرْجَمُ وَرَجُلٌ خَرَجَ مُحَارِبًا لِلَّهِ وَرَسُولِهِ فَإِنَّهُ يُقْتَلُ أَوْ يُصْلَبُ أَوْ يُنْفَى مِنَ الأَرْضِ أَوْ يَقْتُلُ نَفْسًا فَيُقْتَلُ بِهَا ‏"‏ ‏.‏


(3) Selon Uthman ibn Affān.

أَخْبَرَنَا مُؤَمَّلُ بْنُ إِهَابٍ، قَالَ حَدَّثَنَا عَبْدُ الرَّزَّاقِ، قَالَ أَخْبَرَنِي ابْنُ جُرَيْجٍ، عَنْ أَبِي النَّضْرِ، عَنْ بُسْرِ بْنِ سَعِيدٍ، عَنْ عُثْمَانَ بْنِ عَفَّانَ، قَالَ سَمِعْتُ رَسُولَ اللَّهِ صلى الله عليه وسلم يَقُولُ ‏ "‏  لاَ يَحِلُّ دَمُ امْرِئٍ مُسْلِمٍ إِلاَّ بِثَلاَثٍ أَنْ يَزْنِيَ بَعْدَ مَا أُحْصِنَ أَوْ يَقْتُلَ إِنْسَانًا فَيُقْتَلُ أَوْ يَكْفُرَ بَعْدَ إِسْلاَمِهِ فَيُقْتَلُ ‏"‏ ‏.‏


(3') Selon Abdallah ibn Umar, via Uthman ibn Affān.

أَخْبَرَنَا أَبُو الأَزْهَرِ، أَحْمَدُ بْنُ الأَزْهَرِ النَّيْسَابُورِيُّ قَالَ حَدَّثَنَا إِسْحَاقُ بْنُ سُلَيْمَانَ الرَّازِيُّ، قَالَ أَنْبَأَنَا الْمُغِيرَةُ بْنُ مُسْلِمٍ، عَنْ مَطَرٍ الْوَرَّاقِ، عَنْ نَافِعٍ، عَنِ ابْنِ عُمَرَ، أَنَّ عُثْمَانَ، قَالَ سَمِعْتُ رَسُولَ اللَّهِ صلى الله عليه وسلم يَقُولُ ‏ "‏ لاَ يَحِلُّ دَمُ امْرِئٍ مُسْلِمٍ إِلاَّ بِإِحْدَى ثَلاَثٍ رَجُلٌ زَنَى بَعْدَ إِحْصَانِهِ فَعَلَيْهِ الرَّجْمُ أَوْ قَتَلَ عَمْدًا فَعَلَيْهِ الْقَوَدُ أَوِ ارْتَدَّ بَعْدَ إِسْلاَمِهِ فَعَلَيْهِ الْقَتْلُ ‏"‏ ‏.‏



D.2. Reconstruction :

لاَ يَحِلُّ

دَمُ امْرِئٍ مُسْلِمٍ إِلاَّ بِإِحْدَىثَلاَثٍ يَزْنِيَ بَعْدَ 
إِحْصَانِهِ أَوْ يَقْتُلَ نَفْسًا أَوْ ارْتَدَّ/خَرَجَ/ يَكْفُرَ  لِدِينِهِ/بَعْدَ إِسْلاَم

□ Cette version reconstruite de 18 mots doit être la version originale du hadith. Un est partagé par deux voies, 15 par trois voies distinctes. Deux termes se retrouvent en synonymie (irtadda/xaraga/yakfura) & (islāmihi/al-dīn). La probabilité d'aboutir à ces trois récits est par conséquent de respectivement 1/(1.72615e3 × 1.7262) = 1/1,383 x 10145 à 1/(9.27315e3 × 9.2732) = 1/2,879 x 10186. Cette probabilité est extrêmement mince dans les deux cas. Ce hadith est par conséquent original de façon quasi certaine. À titre de comparaison, la partie observable de l'univers équivaut en volumes de Planck à 10185.

□ Pour avoir un ordre d'idée de la fiabilité mathématique de ce hadith, imaginez que nous placions 5 phrases en arabe de 18 mots dans chaque volume de Planck de l'univers observable, et que nous cherchions à tomber sur ce hadith du premier coup. 

□ Le sens de la troisième partie est de même retenue fermement, mais les mots exacts d'origine ne sont pas décidables.



D.3. Méthodologie de reconstruction isnād-cum-matn :


Selon les chroniqueurs médiévaux, le nombre de hadiths existants au premier siècle hégirien tournerait autour de 500.000 à 600.000 variantes. En prenant l'estimation la plus haute de 1.500.000 de variantes ayant jamais existé [2], et sachant que leur nombre retenu à travers les compilations existantes ce nombre tourne autour de 40.000 hadiths, il devient pertinent de reconstruire un récit suivant le procédé suivant.

Lorsqu'un récit nous parvient par différentes voies, il faut recouper les récits par voies distinctes de chaînes de transmission. Il est intéressant de compléter cette méthode analytique, avec l'approche probabiliste de la fiabilité des rapporteurs développée par H. Aydemir [3]. Lorsqu'un mot se retrouve sur au moins deux voies distinctes, il faut le retenir, de même, si il y a des synonymes, il faut les notifier. Ainsi, il devient possible de retrouver le récit d'origine par une méthodologie appuyée par les mathématiques. 

En effet, la probabilité que deux racines se retrouvent, dans deux variantes d'un récit parallèle, à travers deux voies de transmissions distinctes est au minimum de 1/1.7264, soit 1/8.874.893.813.776. Cela équivaut à un taux de 1,69 x 10-7 % de tomber sur cette convergence par hasard avec la génération de 1.500.000 récits indépendants, et sur base de 1.726 racines. Les récits reconstitués s'en retrouvent souvent réduits et raccourcis, mais la reconstruction aboutit à une variante dont le niveau de fiabilité s'évalue scientifiquement selon des critères rigoureux et vérifiables.

Pour rappel, en physique des particules, pour accepter l'existence d'une particule prédite par un théoricien, il est exigé d'arriver à une espérance de 5 σ, ou écart-type. Ce qui correspond à un taux d'erreur acceptable jusqu'à 0,00006%. Soit 4/10.000.000. Notre méthode mathématique de reconstruction des hadiths est donc puissante sur le plan scientifique.

Néanmoins, notre méthode n'est valable que pour les hadiths réunissant certains critères, à savoir : 1. consister en des propos directement attribuées au Messager, 2  Être retenu par au moins deux voies distinctes indifférentes, 3. Les chaînes de transmissions doivent respecter les critères suffisants pour vérifier la source de bout en bout. 

Or, la méthode peut être étendue de façon analytique à des affirmations sur des faits et/ou gestes attribuées au Prophète, en respectant les trois conditions supra. Pour cela, il faudra déconstruire les affirmations en une suite logique rigoureuse d'articulations sémantiques décrivant en détails ce qui est rapporté, que nous pouvons nommer phylogénie pragmatique. Par exemple, si nous obtenons une suite A+B+C+D+E+F+G+H+I, par quinze voies distinctes, la probabilité de coïncidence sera de 1/915, soit 1/2,059 x 1014. Une pratique musulmane répandue peut être due à une influence tierce, comme une personnalité influente en dehors du Prophète. C'est pourquoi le système de transmetteurs identifiés a toute son importance dans cette recherche.



E. Manuscrits des compilations de hadiths : 

Chronologiquement, les manuscrits encore détenus des ouvrages de hadiths classiques ne remontent pas jusqu'au moment de leur compilation. Il arrive que nous puissions relever des points de divergences parmi les différents manuscrits de ces ouvrages de référence. Ainsi, le ʤāmiʔul aħīħ d'al-Bukhari nous parvient via ibn Hajar et via Ayni suivant des chaînes de transmissions séparées, et le plus ancien manuscrit encore existant est daté du XVeS. Les deux versions différant tout de même en quelques dixaines de points, certes non conséquents. De même, le sunan de Tirmidhi est tenu sous différentes versions.

Techniquement, il est exigé pour accepter ces ouvrages, que nous disposions de trois manuscrits distincts se confortant mutuellement. Que ces manuscrits remontent à la même époque n'étant pas exigée.

La nécessité de faire une analyse textuelle suivant les différentes voies de transmissions exigeant de gommer ces déformations de façon systématique, et de reconstruire les récits originaux de façon vérifiable et mesurable.



F. Rejeter un xabar aħad est-ce mécroire ?

Rejeter un xabar aħad n'exclut pas un fidèle de l'islam de l'avis de la majorité écrasante des savants. Par ailleurs, les Sahabas aussi en arrivaient à rejeter certains hadiths transmis par d'autres Sahabas qu'ils n'avaient pas entendus personnellement et leur semblant être une erreur de leurs amis. De même, les fondateurs des écoles de jurisprudence aussi en arrivaient régulièrement à rejeter des xabar aħad.

Cependant, railler le contenu d'un tel récit, n'est conforme ni à l'esprit scientifique, ni à la raison, ni au comportement exigé d'un musulman. D'autant plus qu'il n'y a jamais de certitude absolue de ce que le contenu ne puisse pas malgré tout avoir une part de réalité.



G. La question de l'abrogation et résolutions de problèmes au cas par cas : 

Il existe des hadiths qualifiés abusément comme abrogés. Historiquement, les personnes venant chez le Prophète pour la résolution de leurs problèmes étaient considérées selon leurs situations spécifiques. Or, le cas d'une personne peut changer selon le milieu. Ou bien, le fait d'uriner en position debout devant un tas d'immondices, ou de défequer étant tourné vers la Ka'ba ou Jérusalem en se cachant des vues au milieu d'un tas de pierres, a pu être considéré parfois comme un élément abrogeant la prohibition de ces actions. Tandis que la pratique d'un hadith tenu pour "abrogé" lorsqu'on se trouve dans la même situation ayant conduit à son avènement devrait être convenable ?

Ainsi, la personne ayant bu ne peut pas prier avant de devenir sobre, dès lors comment considérer le verset instruisant cette règle abrogée ? Lorsque les conditions d'une situations rejoignent celles de l'avènement d'un hadith, sa pratique devra de même être acceptable. La tendance à vouloir extrapoler les hadiths pour en déduire des règles de plus en plus générales a ainsi conduit la jursisprudence islamique à devoir élaguer de nombreux hadiths qui sont tout aussi fiables que d'autres étant tenus comme fondés.



H. Hésitation à discuter les avis et paroles des Sahabas : 

وَالسَّابِقُونَ الأَوَّلُونَ مِنَ الْمُهَاجِرِينَ وَالأَنصَارِ وَالَّذِينَ اتَّبَعُوهُم بِإِحْسَانٍ رَّضِيَ اللّهُ عَنْهُمْ وَرَضُواْ عَنْهُ وَأَعَدَّ لَهُمْ جَنَّاتٍ تَجْرِي تَحْتَهَا الأَنْهَارُ خَالِدِينَ فِيهَا أَبَدًا ذَلِكَ الْفَوْزُ الْعَظِ
 

(9:100) : "Les tout premiers [croyants] parmi les Emigrés et les Auxiliaires et ceux qui les ont suivis dans un beau comportement, Allah les agrée, et ils l’agréent. Il a préparé pour eux des Jardins sous lesquels coulent les ruisseaux, et ils y demeureront éternellement. Voilà l’énorme succès."


Est-il acceptable de rejeter des avis de Sahabas qui ne se fondent pas sur le Coran ou des enseignements propres du Prophète ? Puisque le verset ci-dessus exprime que leur comportement est exemplaire pour les musulmans ?

Relisons ce verset dans son contexte avec les versets précédants et suivants ; (9:97-101) : "Les Bédouins sont plus endurcis dans leur impiété et dans leur hypocrisie, et les plus enclins à méconnaître les préceptes qu’Allah a révélés à Son messager. Et Allah est Omniscient et Sage. Parmi les Bédouins, certains prennent leur dépense (en aumône ou à la guerre) comme une charge onéreuse, et attendent pour vous un revers de fortune. Que le malheur retombe sur eux ! Allah est Audient et Omniscient. (Tel autre,) parmi les Bédouins, croit en Allah et au Jour dernier et prend ce qu’il dépense comme moyen de se rapprocher d’Allah et afin de bénéficier des invocations du Messager. C’est vraiment pour eux (un moyen) de se rapprocher (d’Allah) et Allah les admettra en Sa miséricorde. Car Allah est Pardonneur et Miséricordieux. Les tout premiers [croyants] parmi les Emigrés et les Auxiliaires et ceux qui les ont suivis dans un beau comportement, Allah les agrée, et ils L’agréent. Il a préparé pour eux des Jardins sous lesquels coulent les ruisseaux, et ils y demeureront éternellement. Voilà l’énorme succès ! Et parmi les Bédouins qui vous entourent, il y a des hypocrites, tout comme une partie des habitants de Médine. Ils s’obstinent dans l’hypocrisie. Tu ne les connais pas mais Nous les connaissons. Nous les châtierons deux fois puis ils seront ramenés vers un énorme châtiment."


Il est évident que la prise des Sahabas comme exemple soit nécessaire suivant le Coran. Mais cela ne peut être pensé comme une immunité chez ceux-ci contre l'erreur ou l'imperfection. En effet les suivre, signifie les suivre dans leur conformité aux critères islamiques et leur fidélité au Prophète Muhammad, de par leur soutien et leur engagement envers ses recommandations, et pas pour leurs opinions personnelles et propres. Ainsi, les Sahabas ont pu par moment, tandis que le Prophète se tenait au milieu d'eux, lui demander : "Ô Messager, est-ce là ton opinion personnelle ou un commandement émanant de Dieu ?". De même, une fois, le Prophète leur dit : "Attachez-vous fermement à ce que je vous recommande en matière de religion, quant à vos affaires mondaines, vous êtes plus savants". (Muslim, Fadail ; ibn Hanbal, Musned ; ibn Maja)

Dans ce cas, les positions politiques et sociologiques des Sahabas peuvent ne pas être suivies si la conjoncture socio-antropolologique a conduit à des changements dans les moeurs ou les usages.







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[1] A. Chafīk el-Khatīb, “Al-Muwāsˁafātu’l-Musˁtˁalāxiyyah wa tˁatbīqātuhâ fi’l-Luɣa-ti’l-ʔˤrabiyyah”, (el-Luɣatu’l-ʔˤabiyyah wa Taħaddiyātu’l-Qarni’l-Hādī wa’l-‘iʃrīn), ed. el-Munaddametu’l-ʔˤrabiyyah li’t-Tarbiyah wa’s-θaqāfe wa’l-ʔUlûm. Tunis, 1996, p. 18.

[2] Mustafa Karataş, Rivayet Tekniği Açısından Hadislerin Artması ve Sayısı, Thèse de doctorat, Istanbul, 1998, pp. 230-231.

[3] Halis  Aydemir, “A  Theoretical Approach to the System of Transmission of Hadīth  Based on  Probability Calculations”,  Hadis Tetkikleri  Dergisi  (HTD), III/1, 2005, pp. 39-72.



1 commentaire:

  1. Il serait théoriquement possible d'intégrer tous les hadiths et le Coran comme bases de données dans un ordinateur équipé d'une intelligence artificielle dans le futur. Afin de traiter les données afin de reconstituer virtuellement un clone numérique du Prophète. Parce-que nous détenons à travers les hadiths d'abondantes données sur lui, permettant s'intégrer ces détails avec une IA et reconstituer un substitut proche du caractère du Prophète Muhammad. Il est de même théoriquement possible, si les échantillons de cheveux qui lui sont attribués sont bien de lui, dévoiler son apparence, ne fût-ce que virtuellement.

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